Lors d’un précédent article[1], nous évoquions la possibilité pour le secteur associatif d’exercer diverses activités, parfois qualifiées d’« improbables ». Nous mettions alors l’accent sur la création de centres de soins dentaires sous la forme associative, telle que prévue par le Code de la Santé Publique.
Depuis la parution de cet article, le régime des centres de santé a été complété par ordonnances et décrets. L’occasion, alors, de revenir sur les modalités de ce régime attractif et d’évoquer les dernières nouveautés en la matière.
1. Rappels sur la définition d’un centre de santé
1.1 Précisions sur la délimitation des activités d’un centre de santé associatif
Une ordonnance du 12 janvier 2018[2] a opéré une modification quant à la définition juridique du centre de santé, en créant, notamment, l’article L.6323-1, alinéa 1, du Code de la Santé Publique :
« Les centres de santé sont des structures sanitaires de proximité, dispensant des soins de premiers recours et, le cas échéant, de second recours et pratiquant à la fois des activités de prévention, de diagnostic et de soins, au sein du centre, sans hébergement, ou au domicile du patient. Ils assurent, le cas échéant, une prise en charge pluriprofessionnelle, associant des professionnels médicaux et des auxiliaires médicaux ».
– Soins de premiers recours
Le texte précise l’obligation pour le centre de santé de dispenser des soins de premiers recours, sans que cette notion soit réellement définie. Au mieux, l’article L.6323-1, dans son deuxième et troisième alinéa indique-il que le centre de santé peut réaliser à titre exclusif des activités de diagnostics, et doit, à titre principal, réaliser des prestations remboursables par l’Assurance Maladie.
La définition du « premier recours » reste donc largement soumise à interprétation par les Agences Régionales de Santé. A titre d’exemple, il nous a ainsi été par exemple communiqué par une ARS qu’une activité d’implantologie dentaire était considérée comme du second recours : dès lors, il est impossible de créer un centre de soins dentaires exclusivement consacré à l’implantologie.
– Soins de second recours et activité annexes
Le centre de santé peut ainsi réaliser des soins dits de second recours, dès lors que cela ne constitue donc pas son activité exclusive.
L’ordonnance du 12 janvier 2018 rend également optionnelles certaines activités qui étaient auparavant obligatoires, et qui peuvent intéresser les centres de soins dentaires : l’accueil de stagiaires, la réalisation de soins ambulatoires, etc.
1.2 Le contenu du projet de santé
Les centres de santé en création doivent élaborer, préalablement à leur ouverture, un projet de santé, prévu aux nouveaux articles L.6323-1-10 et suivants du Code de la Santé Publique.
Ce projet de santé doit porter, en particulier, sur l’accessibilité et la continuité des soins ainsi que sur la coordination des professionnels de santé au sein du centre et avec des acteurs de soins extérieurs. Il doit en outre être remis au directeur de l’Agence Régional de Santé, qui émet un récepissé valant autorisation d’ouverture.
Le contenu de ce projet de santé a été précisé par un arrêté du Ministère des Solidarités et de la Santé du 27 février 2018. Ce document doit comprendre un certain nombre d’informations :
– Le diagnostic des besoins du territoire, décrivant les caractéristiques de population, les problématiques du territoire, etc. ;
– Les coordonnées complètes du centre et des fondateurs ;
– La liste des professionnels exerçant au sein du centre ;
– Les missions et les activités du centre de santé ;
– Les dispositifs mis en œuvre pour assurer la coordination interne des professionnels de santé, les partenariats et les modalités de partage des informations de santé des patients.
En outre, est annexé à ce projet de santé, un règlement de fonctionnement précisant notamment les règles d’hygiène, de sécurité des soins, ainsi que les informations relatives aux droits des patients.
2. L’ouverture des centres de soins dentaires aux cliniques et SCOI
L’ordonnance du 12 janvier 2018 ouvre la création des centres de santé soit par des organismes à but non lucratif, des collectivités territoriales, des établissements publics de coopération intercommunale, des établissements publics de santé, des personnes morales gestionnaires d’établissements privés de santé, à but non lucratif ou à but lucratif.
Un centre de santé peut également être créé et géré par une société coopérative d’intérêt collectif. Dans cette hypothèse toutefois, les seules personnes morales pouvant être associées de la société coopérative d’intérêt collectif sont les personnes mentionnées ci-dessus.
Etant précisé que si l’ordonnance ouvre la possibilité de création d’un centre de santé par une clinique, il demeure que les bénéfices issus de l’exploitation d’un centre de santé ne peuvent pas être distribués. Ils doivent être mis en réserve ou réinvestis au profit du centre de santé concerné ou d’un ou plusieurs autres centres, ou d’une structure à but non lucratif.
A noter que l’ordonnance instaure une responsabilité du représentant légal de l’organisme gestionnaire du centre de santé, pouvant aller jusqu’à la suspension des activités, voir la fermeture du centre.
3. La possibilité de créer des antennes
Le Code de la Santé Publique admet la possibilité pour le centre de santé de créer et de gérer des antennes. Un décret du 27 février 2018[3] précise que ces antennes « peuvent être rattachées à un ou plusieurs centres de santé gérés par un même gestionnaire. Chaque antenne est soumise à l’ensemble des règles applicables aux centres de santé ».
L’arrêté du 27 février 2018, quant à lui, indique que l’antenne doit répondre à l’ensemble des caractéristiques suivantes :
– Elle est rattachée à un ou plusieurs centres de santé principal et ne dispose pas d’autonomie de gestion ;
– Elle propose des heures d’ouverture ne pouvant excéder vingt heures par semaine ;
– Elle est située à moins de trente minutes de trajet du centre de santé principal ;
– Elle dispose d’un système d’informations partagé avec le centre de santé principal, permettant notamment le partage des informations issues du dossier médical des patients
En conclusion, la création d’un centre de santé sous la forme associative reste un schéma toujours attractif, dont les contours, précisés, apportent une plus grande sécurisation de la structure. En créant le centre au travers d’une association, ce dernier ne sera toujours soumis aux impôts commerciaux que si son activité est reconnue par l’administration fiscale comme étant lucrative, au regard des règles de droit commun en la matière[4].
Colas Amblard et Anthony BERGER
Avocats
Documents joints :
Ordonnance du 2 janvier 2018
Décret du 27 février 2018
Arrêté du 27 février 2018
En savoir plus :
Créer un centre de soins dentaires sous forme associative : c’est possible !
- L’innovation sociale, une activité d’intérêt général ? - 27 novembre 2024
- HCVA : précisions sur le rescrit mécénat - 27 novembre 2024
- Table ronde :Quel avenir pour les associations ? – 5 décembre 2024 - 27 novembre 2024
Documents joints:
2018-01-12-Ordonnance-centres de santé
2018-02-27-Décret centres de santé
2018-02-27-Arrêté centres de santé
Notes:
[1]C. AMBLARD « Créer un centre de soins dentaires sous forme associative : c’est possible !»
[2]Ordonnance n°2018-17 du 12 janvier 2018
[3]Décret n°2018-143
[4]Instruction fiscale du 18 décembre 2006 – BOI 4H-5-06 – BOFIP – BOI-IS-CHAMP-10-50-10-20-20170607