Nous sommes en novembre 2022, le pays se relève de deux ans de crise sanitaire et il convient d’en « tirer des leçons ». En effet, cette période particulière ne sera pas la dernière et déjà d’autres évènements se présagent, dessinant une première conclusion : il est nécessaire d’anticiper. Cela ne signifie pas qu’il faut prévoir chaque aléa. Mais il faut envisager des situations diverses, se questionner sur sa manière de réagir et s’y préparer.
Lorsqu’une entité n’a pas prévu ou anticipé les risques qui peuvent survenir, les conséquences peuvent être majeures voire irrémédiables. Si les organisations non lucratives sont soumises aux mêmes difficultés que n’importe quelle entité face au marasme, elles n’ont pas toutes les mêmes leviers structurels et financiers pour s’en sortir. Ce constat n’est pas celui d’un manque de rigueur dans la gestion associative. Au contraire, c’est celui d’une bonne gestion, de redistribution des réserves pour servir l’objet d’un écosystème indispensable au tissu social, économique et culturel français.
Est-ce qu’un management des risques efficace peut réduire les défaillances des organisations non lucratives en France, mais également en améliorer la performance en matière d’attractivité voire de rentabilité ?
Dans un objectif de pérennisation, la mise en place de plans d’actions peut-elle être anticipée, pour maîtriser les risques face aux enjeux d’un environnement interne et externe évolutif ?
La mise en place d’une cartographie des risques est une réponse efficace car elle ne se contente pas de lister les risques mais elle les qualifie (en fonction de leur probabilité de survenance et de leurs impacts) et les hiérarchise, permettant ainsi de déterminer des plans d’actions adaptés.
L’anticipation et la mise en œuvre de ces plans d’actions préventifs ou rectificatifs sont nécessaires au fonctionnement pérenne de l’organisation. L’objectif est de faire face aux risques en les atténuant, ou en les transformant en opportunités.
Il faut par ailleurs prendre en compte la notion d’efficience dans les actions déployées pour réduire le risque et atteindre la « valeur cible ». C’est-à-dire, une assurance raisonnable de déployer les forces adaptées pour atteindre un résultat acceptable.
De plus, le risque zéro n’existant pas, la démarche proposée doit tenir compte de l’appétence pour le risque de la direction lorsqu’elle définit son niveau d’acceptation. Certains évènements sont par ailleurs impondérables et peuvent ne pas être prévus car ils sont, à ce stade, inimaginables.
L’analyse des risques s’entend donc par deux phases majeures :
La première partie est une phase d’accompagnement de l’association dans la définition de sa stratégie portée vers la création de la valeur. L’analyse de l’environnement de l’organisation est une étape clé de la démarche car elle permet d’appréhender le milieu dans lequel elle évolue. L’outil de diagnostic stratégique à mettre en œuvre est décomposé en trois étapes :
- Une analyse interne des atouts et des faiblesses de l’organisation ;
- Une analyse externe en fonction du secteur ;
- Un outil de détermination des capacités de l’organisation qui mène à l’identification de ses facteurs clés de succès.
L’association se fixe donc des objectifs en appréhendant désormais ses avantages comparatifs et aligne sa stratégie en conséquence.
Les risques inhérents identifiés sont analysés par le management des risques qui met en œuvre des actions de contrôle interne permettant d’éviter certaines menaces mais également de saisir les opportunités qui se présentent.
Enfin, pour maîtriser les risques résiduels à cette première analyse, la mise en place d’une cartographie des risques est une réponse pertinente.
Ainsi la seconde partie est le déploiement de la cartographie des risques. Celle-ci est d’autant plus précise lorsqu’elle est mise en place pour un segment déterminé de l’entité : pour une activité, un service voire un projet spécifique.
Les risques clés sont cotés selon leur niveau de gravité et leur probabilité d’occurrence : il en ressort une hiérarchisation des risques qui peut être aisément visualisable grâce à un outil de cotation des risques.
Toutefois, la classification des risques n’est pas une finalité en soi : elle permet de prioriser les plans d’actions à mettre en œuvre pour traiter les risques jugés inacceptables par la direction. L’assurance que les actions sont effectivement menées est scellée par la responsabilisation des « propriétaires » du risque. Ce sont les directeurs de service, ceux qui ont en charge la responsabilité de faire traiter le risque.
Nonobstant cette responsabilisation, il convient de s’assurer de l’effectivité des plans. Un contrôle peut être effectué en interne par la direction, par un comité d’audit ou encore externalisée à un professionnel du chiffre (expert-comptable ou commissaire aux comptes).
Il est toutefois à préciser que chaque entité possède des caractéristiques qui lui sont propres, une stratégie, une vision qui lui est propre. Il convient de parachever cette analyse en l’adaptant, en la personnalisant.
Finalement, la mise en place d’une cartographie des risques est un bon outil de prévision et d’anticipation. Mais c’est également une démarche de prise de conscience de l’organisation et de son environnement, lui permettant de réagir sereinement face aux aléas. En substance, ce processus d’analyse est un cheminement vers la pérennisation de l’activité de l’organisation.
Paul PRUD’HOMME
Commissaire aux comptes – Expert Comptable