Outils indispensables de lutte contre la désertification médicale, les centres de santé peuvent désormais être créés sous la forme de sociétés coopératives d’intérêt collectif (SCIC) depuis l’ordonnance du 12 janvier 2018, ouvrant ainsi de nouvelles perspectives de démocratie dans le domaine des soins médicaux. Rappelant le caractère non lucratif de ces organismes de soins, le ministère de l’Economie, des finances et de la relance a été interrogé sur la possibilité pour ces Centres de santé de bénéficier d’une exonération de taxe sur les salaires.

 

Centres de santé, sous forme de SCIC : vers une véritable démocratie sanitaire ?

Le premier alinéa de l’article 6323-1-3 du Code de la santé publique prévoit que « les centres de santé sont créés et gérés soit par des organismes à but non lucratif, soit par des collectivités territoriales, soit par des établissements publics de coopération intercommunale, soit par des établissements publics de santé, soit par des personnes morales gestionnaires d’établissements privés de santé à but non lucratif ou à but lucratif. » Depuis l’ordonnance du 12 janvier 2018[1]Ord. n°2018-17 du 12 janv. 2018 relative aux conditions de création et de fonctionnement des centres de santé (JORF du 13 janv.), un centre de santé peut également être créé et géré « par une société coopérative d’intérêt collectif régie par le titre II ter de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération. Dans une telle hypothèse, par dérogation à l’article 19 septies de cette loi, les seules personnes morales pouvant être associées de la société coopérative d’intérêt collectif sont les personnes mentionnées au premier alinéa du présent article. »

Ce multi-sociétariat (patients, collectivités territoriales et opérateurs publics ou privés) offert par la SCIC[2]L. 10 sept. 1947 portant statut de la coopération, art. 19 quinquies : les SCIC ont pour objet la production ou la fourniture de biens et de services d’intérêt collectif, qui présentent une … Continue reading présente plusieurs avantages :

  • Les patients deviennent de véritables acteurs du système de santé dans les territoires conformément à l’esprit de la loi du 26 janvier 2016[3]L. 2016-41 du 26 janv. 2016 de modernisation de notre système de santé (JO du 27);
  • Les opérateurs de santé publics et privés participent à une meilleure articulation des projets de santé avec la médecine hospitalière, les services de soins de suite, les services à la personne, les Ehpad ainsi que les mutuelles ;
  • Les collectivités territoriales participent à l’identification des besoins et des ressources en matière de soins au plus près des territoires et en réponse aux évolutions pathologiques de nos concitoyens (augmentation des polypathologies, maladies chroniques, vieillissement de la population…).

Par ailleurs, les professionnels de santé en devenant salariés dans les centres de santé se voient ainsi offrir un cadre d’intervention répondant mieux à leurs aspirations en leur offrant un mode de vie et des conditions de travail plus sereines et efficaces.

Véritable outil de lutte contre les déserts médicaux[4]S. Castaigne et Y. Lasnier, Les déserts médicaux, avis CESE, 14 déc. 2017 https://www.lecese.fr/travaux-publies/les-deserts-medicaux, ruraux ou urbains[5]C. Amblard, Centres de santé : un remède à la désertification médicale, Juris associations, 1er juin 2020, n°620, pp. 32 à 35 , les centres de santé placés sous l’autorité des Agences régionales de Santé permettent ainsi un véritable ancrage local des politiques de santé.

 

 

Abattement forfaitaire annuel de taxe sur les salaires : le gouvernement dit non !

Dans une réponse ministérielle en date du 24 septembre 2020[6]Rep. Min Eco, Fin. et Relance, 24 sept. 2020, JO Sénat, p. 4352, le gouvernement vient de rappeler que les Centres de santé constitués sous la forme de SCIC ne peuvent bénéficier de l’abattement forfaitaire annuel[7]Soit 21.044 € pour la taxe due en raison des rémunérations versées depuis le 1er janv. 2020 de taxe sur les salaires normalement due[8]CGI, art. 1679 A. La raison principale réside dans le fait que l’activité de soins qu’ils dispensent échappe à la TVA[9]CGI, art 261, alors même que seuls les organismes redevables de la TVA peuvent échapper à la taxe sur les salaires. Dès lors, c’est l’ensemble des Centres de santé, peu importe la forme juridique retenue, qui se voit refuser ce droit à abattement.

 

Cela étant, il doit être précisé à cette occasion que les centres de santé :

  • Se voient appliquer des taux de taxe sur les salaires différents en fonction du niveau des rémunérations versées : 4,25% pour le taux normal ; 8,5% supplémentaires pour la fraction des rémunérations individuelles annuelles excédant 8.004 € et inférieure à 15.981 € ; 13,60% supplémentaires pour la fraction de ces rémunérations excédant 15.981 € ;
  • Peuvent bénéficier d’une franchise de taxe sur les salaires lorsque son montant annuel du n’excède pas 1.200 € ainsi que d’une décote égale au ¾ lorsque le montant annuel de la taxe est supérieur à 1.200 € sans excéder 2.040 €[10]CGI, art. 1679, al. 2.

Par ailleurs, sur le plan fiscal, ces organismes sont assujettis à l’impôt sur les sociétés (IS) selon le droit commun[11]CGI, art. 206-1. Cela étant, et afin de tenir compte des spécificités des SCIC, il est rappelé que l’article 50 de la loi de finances rectificative pour 2007 a aménagé les dispositions de l’article 206 du CGI relatif aux sociétés et collectivités imposables à l’IS. Ainsi, l’article 206-5 ter du CGI prévoit une déductibilité de la part des excédents mis en réserves impartageables[12]Soit un minimum de 57,5% des résultats de la SCIC du bénéfice imposable des SCIC. En d’autres termes, les excédents mis en réserves impartageables par ces organismes ne sont pas soumis à l’IS.

 

Colas AMBLARD, avocat

 

En savoir plus :

Utilité sociale pour les sociétés coopératives d’intérêt collectif : toujours dans l’attente du décret…

C. Amblard, Centres de santé : un remède à la désertification médicale, Juris associations, 1er juin 2020, n°620, pp. 32 à 35

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References

References
1 Ord. n°2018-17 du 12 janv. 2018 relative aux conditions de création et de fonctionnement des centres de santé (JORF du 13 janv.)
2 L. 10 sept. 1947 portant statut de la coopération, art. 19 quinquies : les SCIC ont pour objet la production ou la fourniture de biens et de services d’intérêt collectif, qui présentent une utilité sociale ; voir égal. H. Sibille, « Contexte et genèse de la création des sociétés coopératives d’intérêt collectif (Scic) », Revue internationale de l’économie sociale : recma, n°324,‎ 2012, p. 110–117
3 L. 2016-41 du 26 janv. 2016 de modernisation de notre système de santé (JO du 27)
4 S. Castaigne et Y. Lasnier, Les déserts médicaux, avis CESE, 14 déc. 2017 https://www.lecese.fr/travaux-publies/les-deserts-medicaux
5 C. Amblard, Centres de santé : un remède à la désertification médicale, Juris associations, 1er juin 2020, n°620, pp. 32 à 35 
6 Rep. Min Eco, Fin. et Relance, 24 sept. 2020, JO Sénat, p. 4352
7 Soit 21.044 € pour la taxe due en raison des rémunérations versées depuis le 1er janv. 2020
8 CGI, art. 1679 A
9 CGI, art 261
10 CGI, art. 1679, al. 2
11 CGI, art. 206-1
12 Soit un minimum de 57,5% des résultats de la SCIC





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