A la différence de l’arrêt de la Cour d’appel de Rennes du 15 mars 2015, commenté ce même jour, la Cour de Riom vient de rappeler que toutes les absences ne valent pas faute grave et encore moins faute lourde.

Les faits

Un joueur de basket professionnel est engagé pour deux saisons consécutives, du 22 août 2010 au 30 juin 2012.

Il est licencié pour faute lourde le 25 octobre 2011 pour son retard à un entrainement et son absence non justifiée au match du lendemain, son attitude indigne et déloyale lors d’un match en prolongation, des accusations écrites incompatibles avec le maintien de son contrat de travail, et son refus de quitter les lieux après notification de sa mise à pied conservatoire.
Il saisit le Conseil de prud’hommes contre son licenciement qu’il estime abusif.
Le Conseil de prud’hommes lui donne raison.
Le club saisit alors la Cour d’appel pour faire invalider le jugement.
 

Le jugement

La Cour confirme le jugement prud’homal.

Elle retient que le retard à l’entrainement qui est reproché au joueur n’a fait l’objet que de simples observations formulées par l’employeur dans un courrier du 1er septembre 2011,

– qu’ à supposer que le manque d’engagement du joueur et ses fautes de jeu lors de la rencontre du 1er octobre 2011 soient établis, il n’est en rien démontré que ceux-ci relèveraient d’un comportement volontairement déloyal ni d’une intention de nuire à l’équipe,

– que, s’agissant du courrier adressé le 3 octobre 2011 au président du club, il apparaît que le joueur ne fait qu’évoquer sa situation personnelle et le conflit existant avec la direction du club et contester les griefs formulés à son encontre sans tenir aucun propos discourtois ou injurieux de telle sorte que les termes de ce courrier ne sauraient constituer un abus de la liberté d’expression dont le salarié doit pouvoir disposer lorsqu’il est amené à dialoguer avec son employeur au sujet de difficultés liées à l’exécution de son contrat de travail

– et enfin que compte tenu de la situation conflictuelle existante entre les parties et des circonstances quelque peu inhabituelles dans lesquelles le président du club entendait notifier au salarié sa mise à pied conservatoire, à savoir de manière uniquement verbale , le refus du joueur de quitter les lieux de l’entraînement le 9 octobre 2011 ne peut être assimilé à un non-respect des instructions données par l’employeur constitutif d’un manquement aux obligations contractuelles ni caractériser une intention de nuire au club.

Dés lors, dit la Cour, c’est à juste titre que les premiers juges ont estimé que les faits reprochés n’étaient constitutifs, ni d’une faute lourde ni d’une faute grave et que la rupture du contrat de travail par l’employeur devait être qualifiée d’abusive.

Le club est condamné à payer au joueur les salaires restant dus jusqu’au terme du contrat de deux saisons, à savoir 66 450, 52 € à titre de dommages-intérêts, outre 1500 € de participation à ses frais d’avocat.

Observations

Dans un cas a priori similaire à celui commenté dans la même rubrique (Abandon de poste et faute grave), la Cour d’appel ni le Conseil de prud’hommes n’ont retenu la faute grave car le salarié justifiait de son retard à l’entrainement et que son comportement lors du match  ne relevait pas d’un « comportement volontairement déloyal ni d’une intention de nuire à l’équipe. »

C’est en effet la caractéristique de la faute lourde, invoquée par le club, d’être commise dans l’intention de nuire à l’employeur ; cette intention n’étant pas démontrée, la faute lourde ne peut exister.

La Cour n’a pas retenu la faute grave non plus, estimant les griefs certes réels, mais pas suffisamment graves pour justifier une rupture immédiate du contrat sans indemnité.

Le CDD ne pouvant être rompu de manière anticipée pour cause réelle et sérieuse, à la différence du licenciement d’un salarié embauché à durée indéterminée, il était normal que le club soit condamné à payer au joueur les salaires restant dus jusqu’au terme des deux ans du contrat, sans que le salarié ait à démontrer un préjudice particulier.

Il est dès lors fortement conseillé au dirigeant de club de s’entourer de tous les conseils possibles avant de prendre une telle décision.

Me J-Christophe Beckensteiner         

Avocat associé                        

Spécialiste en droit du travail  

Cabinet Fidal, Lyon               

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