Le juge devant mettre en balance le droit au respect de la vie personnelle du salarié et le droit à la preuve de l’employeur, un mode de preuve a priori illicite n’entraîne pas nécessairement son rejet des débats.
Cette décision est transposable au secteur associatif.
Un employeur licencie pour faute grave une caissière en pharmacie pour avoir notamment sous-facturé volontairement des produits. Les fautes commises ont été révélées par le système de vidéosurveillance mis en place au sein de la pharmacie.
La cour d’appel, jugeant le licenciement bien-fondé, a considéré que les fautes commises étaient corroborées par les enregistrements vidéo jugés licites en raison de l’ouverture de l’établissement au public, des risques d’agression ou de vol et de la nécessité d’assurer la sécurité des biens et des personnes au sein de l’établissement. Par ailleurs, la cour d’appel a constaté que les salariés étaient informés de la mise en place du système par une note de service.
La Cour de cassation casse pourtant l’arrêt rendu par la cour d’appel. En effet, la Cour rappelle qu’au-delà d’assurer la sécurité des biens et des personnes, le système de vidéosurveillance permettait également à l’employeur de surveiller l’activité des salariés et d’exploiter des informations personnelles concernant la salariée. L’employeur aurait ainsi dû consulter le CSE concernant l’utilisation de ce dispositif à cette fin. Le moyen de preuve est donc illicite.
Pour autant, la Cour de cassation ajoute que « l’illicéité d’un moyen de preuve n’entraine pas nécessairement son rejet des débats, le juge devant apprécier si l’utilisation de cette preuve a porté atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble, en mettant en balance le droit au respect de la vie personnelle du salarié et le droit à la preuve, lequel peut justifier la production d’éléments portant atteinte à la vie personnelle d’un salarié à la condition que cette production soit indispensable à l’exercice de ce droit et que l’atteinte soit strictement proportionnée au but poursuivi ».
Un mode de preuve illicite peut ainsi justifier un licenciement pour faute, si les juges estiment que l’utilisation de cette preuve est nécessaire à garantir le respect du droit à la preuve de l’employeur, et à condition que l’atteinte à la vie personnelle du salarié soit proportionnée au but poursuivi.
Lou MORIEUX, Avocate en droit du travail et droit de la protection sociale
En savoir plus :
Cass. Soc. 10 novembre 2021, n°20-12.263
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