Au 1er janvier 2010, il ressort que le secteur associatif est directement à l’origine de la création de 37,5% des fonds de dotation (1). Quels intérêts les associations peuvent – elles avoir à s’adjoindre une structure de ce type ? Différentes situations peuvent se présenter en raison de la nature contractuelle du fonds de dotation, et par conséquent, de sa « plasticité » :
- L’association assujettie aux impôts commerciaux qui souhaite faire du mécénat : pour ce type d’association, constituer un fonds de dotation, seule ou avec des partenaires, peut permettre de bénéficier des réductions d’impôt attachées au régime fiscal du mécénat (réduction d’impôt sur les sociétés à hauteur de 60% de la valeur du don dans la limite de 0.5% du chiffre d’affaires annuel). L’association fiscalisée aura, en outre, la satisfaction de réintégrer par l’intermédiaire de cette structure, la sphère des organismes concourant à l’intérêt général.
- L’association simplement déclarée peut vouloir accéder à la « grande capacité juridique » par l’intermédiaire d’un fonds de dotation : en effet, le fonds de dotation dispose de la capacité de recevoir des dons et des legs exonérés de droit de mutation (2) en vue de financer des activités d’intérêt général ou des organismes sans but lucratif concourant à la réalisation d’une action d’intérêt général (3). Dans ces conditions, une association qui envisage de développer une nouvelle activité dans son champ d’action statutaire peut envisager l’obtention de financements complémentaires par ce biais.
- L’association peut vouloir apporter à un fonds de dotation unipersonnel un patrimoine immobilier : l’objectif consiste pour l’association à s’exonérer du paiement de l’impôt sur les sociétés au titre de ses revenus patrimoniaux (CGI, art. 206-5), tout en conservant la maîtrise de ses biens immobiliers. Les revenus générés par ces biens immobiliers apportés au fonds de dotation peuvent ainsi être affectés au financement d’une activité ou d’un organisme d’intérêt général, en franchise d’impôt sur les sociétés (CGI, art. 206-1 et 206-5) si le fonds de dotation adopte le principe de la dotation non consomptible.
- L’association peut vouloir créer un fonds de dotation en vue d’apporter, seule ou avec des partenaires extérieurs, un soutien financier à d’autres organismes sans but lucratif dans le cadre de la réalisation d’activités d’intérêt général : c’est ainsi qu’une fédération ou plusieurs ligues sportives peuvent envisager la création d’un fonds de dotation en tant que véritable « groupement de moyens » dédié à la recherche de financements privés en vue d’en faire profiter les organismes sans but lucratif qui composent son réseau.
- L’association dont les capitaux propres sont très importants peut avoir intérêt à créer un fonds de dotation afin de préserver sa situation financière : la question de la gestion des fonds de réserve associatifs se pose avec une certaine acuité au regard des perspectives nouvellement offertes par le fonds de dotation. En effet, si l’instruction fiscale BOI 4 H-5-06 du 18 décembre 2006 rappelle qu’« il est légitime qu’un organisme non lucratif dégage, dans le cadre de son activité, des excédents reflets d’une gestion saine et prudente », l’administration fiscale considère néanmoins qu’ « (…) il ne doit pas les accumuler dans le but de les placer ». Outre le risque fiscal engendré par une telle accumulation, une telle situation peut persuader les financeurs publics de diminuer leurs subventions à due proportion. Que faire dès lors de ces fonds de réserve ? L’association qui ne dispose pas de la possibilité de constituer une fondation d’entreprise (L. n°87-571 du 23 juillet 1987, art. 19) peut ainsi souhaiter « confier » une partie de ses réserves à un fonds de dotation afin de préserver et sécuriser sa situation financière au regard des contraintes précédemment évoquées.
- L’association qui veut financer ses propres activités d’intérêt général : cette possibilité est ouverte dans des conditions très strictes. En effet, une association peut solliciter l’administration dans le cadre de la procédure de rescrit fiscal spécifique (LPF, art. 80 C) afin de se voir reconnaître la qualité d’organisme d’intérêt général pour tout ou partie de ses activités. Dans ces conditions, il est parfaitement possible d’envisager qu’une association fiscalisée (ou non) procède à la création d’un fonds de dotation (« de redistribution ») dans le but d’apporter un financement direct aux activités d’intérêt général qu’elle réalise elle-même (CGI, art. 200 et 238 bis). Bien évidemment, l’affectation des valeurs effectuée par l’intermédiaire du fonds de dotation ne devra pas prendre le caractère d’une distribution illégale de bénéfices (L. 2008-776, art. 140).
Ainsi, on le voit, et comme le souligne Mme Christine Lagarde, le fonds de dotation est avant tout « un outil complémentaire, générique, à la disposition de tous […] » . C’est précisément en cela que le fonds de dotation constitue véritablement une révolution. Le secteur associatif est actuellement en train d’apprendre à tirer partie de ce nouveau dispositif qu’il convient, toutefois, de savoir manier avec précaution et discernement.
Article réactualisé le 27 mai 2021.
Docteur en droit – Avocat
Directeur des publications
Cet Edito fait l’objet d’une publication aux éditions Wolters Kluwer Lamy Associations Bulletin d’actualités n°181 d’avril 2010 : Voir en ligne
En savoir plus :
C. Amblard, « Le fonds de dotation : une révolution dans le monde des institutions sans but lucratif », Editions Wolters Kluwer Lamy Associations, collection Lamy Axe Droit, avril 2010 : commander en ligne
Voir la vidéo de présentation de l’ouvrage Lamy Axe Droit visionner en ligne
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Documents joints:
Notes:
[1] Etude statistique NPS CONSULTING Société d’avocats menée à partir de l’analyse des statuts des 80 premiers fonds de dotation déclarés en Préfecture entre le 13 février 2009 et le 1er janvier 2010 disponible in C. Amblard, Les fonds de dotation : une révolution dans le monde des ISBL ?, 264 pages, Editions Wolters Kluwer Lamy Associations (parution avril 2010)
[2] Instr. fisc. 7G-6-09 du 2 juillet 2009, par. 8
[3] L. 2008-776 préc., art. 141