TEXTE DE LA QUESTION n° 63267 de Mme Pascale Got (Socialiste, radical, citoyen et divers gauche – Gironde). Mme Pascale Got attire l’attention de M. le ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales sur les incertitudes qui existent pour savoir si l’adhésion d’une collectivité territoriale à un organisme fournissant des prestations d’action sociale constitue un marché de services soumis aux règles du code des marchés publics. Un avis du Conseil d’État du 23 octobre 2003 « Fondation Jean Moulin » précise que les prestations sociales confiées à un organisme à but non lucratif se fait hors du code des marchés publics. En revanche, dans un arrêt du 27 juin 2005 « Comité d’action culturelle et sociale de la ville de Corbeil-Essonnes », la cour administrative de Paris a précisé que l’adhésion d’une commune au CNAS présente le caractère d’un marché public de services et relève donc de la procédure du code des marchés publics. Cette position est renforcée par l’article 3 du code des marchés publics qui dispense certaines catégories de marchés limitativement énumérées, sans prévoir les prestations d’action sociale. Compte tenu de ces incertitudes juridiques et des risques de contentieux pour les collectivités locales, elle souhaite savoir précisément si ces prestations sociales relèvent des règles du code des marchés publics ou si elles en sont exonérées.
TEXTE DE LA REPOSE : Aux termes de l’article 1er du code des marchés publics, « les marchés publics sont les contrats conclus à titre onéreux entre les pouvoirs adjudicateurs définis à l’article 2 et des opérateurs économiques publics ou privés, pour répondre à leurs besoins en matière de travaux, de fournitures ou de services ». Il ressort de cette définition que la réglementation relative aux marchés publics ne s’applique pas aux activités non marchandes, c’est-à-dire lorsque l’organisme tiers n’agit pas en tant qu’opérateur économique. Dans son avis Fondation Jean Moulin (Ass., avis, 23 octobre 2003, n° 369315), le Conseil d’État a précisé que « la qualification d’action sociale ne peut être reconnue à ces prestations que si, par leur contenu, elles présentent des caractéristiques garantissant leur vocation sociale et les distinguant des prestations à caractère purement marchand ; ce qui suppose notamment qu’elles ne se bornent pas à offrir des services disponibles et aisément accessibles, en termes de localisation et de prix, sur le marché et que leurs conditions d’octroi et de tarification les rendent accessibles à l’ensemble des agents, en particulier ceux à revenus modestes ». Pour le Conseil d’État, relèvent de l’action sociale « toutes les prestations à caractère individuel versées, au cas par cas, après examen de la situation particulière des agents et qui sont, au demeurant, d’un montant souvent modeste, ainsi que les prestations à caractère collectif tournées vers les catégories de personnel les moins favorisées, comme les séjours linguistiques, les séjours dits de découverte, les séjours réservés aux enfants handicapés, la gestion des crèches et des restaurants administratifs ou de l’arbre de Noël qui constituent les éléments les plus traditionnels de l’action sociale de l’État ». Dans l’avis précité, le Conseil d’État a considéré en l’espèce que les prestations d’action sociale servies par la fondation aux agents du ministère de l’intérieur avaient, eu égard à leur nature, un caractère non marchand et précisé qu’en conséquence, l’opérateur appelé à fournir ces prestations non économiques ne pouvait être regardé comme un opérateur économique. Dans une telle hypothèse, le Conseil d’État a estimé que les dispositions de l’article 9 de la loi du 17 juillet 1983 permettaient aux collectivités publiques « de choisir un ou plusieurs organismes pour gérer de telles prestations sans avoir à respecter les procédures de publicité et de mise en concurrence prévues par le code des marchés publics ». Le Conseil d’État a confirmé dans un arrêt du 6 avril 2007 (commune d’Aix-en-Provence, n° 284736), que les collectivités publiques peuvent ne pas passer un marché public de services « lorsque, eu égard à la nature de l’activité en cause et aux conditions particulières dans lesquelles il exerce, le tiers auquel elles s’adressent ne saurait être regardé comme un opérateur sur un marché concurrentiel ». Certaines commandes, à caractère social en particulier, peuvent ainsi être passées avec des organismes qui, compte tenu de la nature de leur activité et des conditions dans lesquelles ils agissent, peuvent être regardés, dans tel lieu et à tel moment, comme des opérateurs non concurrentiels : le contrat éventuel qui les lie alors à la collectivité n’est pas analysé comme un marché public. Toutefois, une telle dispense n’est possible que si une analyse concrète permet de conclure, compte tenu d’un contexte spécifique, que la commande ne s’adresse pas à des opérateurs concurrentiels. À défaut, les prestataires chargés de fournir de telles prestations devront être sélectionnés conformément aux dispositions prévues par le code des marchés publics.
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