Toutes les personnes physiques ou morales qui versent des traitements et salaires sont passibles de la taxe sur les salaires.
En effet, il est prévu que les sommes payées à titre de traitements, salaires, indemnités et émoluments, y compris la valeur des avantages en nature, sont soumises à une taxe sur les salaires qui est à la charge des personnes ou organismes qui paient les sommes dont il s’agit.
Sont notamment exonérés de la taxe sur les salaires :
- les collectivités locales et leurs groupements, les centres d’action sociale dotés d’une personnalité propre et subventionnés par les collectivités locales, les caisses des écoles ;
- les employeurs assujettis à la TVA sur au moins 90 % de leur chiffre d’affaires de l’année civile précédant celle du paiement des salaires. Pour les personnes ou organismes qui ne sont pas assujettis à la TVA ou ne l’ont pas été sur 90 % au moins de leur chiffre d’affaires au titre de l’année civile précédant celle du paiement des rémunérations taxables, l’assiette de la taxe est constituée par une partie des rémunérations versées, déterminée en appliquant à l’ensemble de ces rémunérations le rapport existant, au titre de cette même année, entre le chiffre d’affaires qui n’a pas été passible de la TVA et le chiffre d’affaires total.
Sont donc imposables à la taxe sur les salaires les associations employeurs qui sont exonérées totalement ou partiellement de TVA en vertu des dispositions de l’article 261-7-1° du CGI, c’est-à-dire celles qui rendent des services à caractère social, éducatif, culturel ou sportif à leurs membres et celles qui réalisent des opérations au bénéfice de toutes personnes par des œuvres sans but lucratif qui présentent un caractère social ou philanthropique et dont la gestion est désintéressée.
Pour l’année 2011, le taux de la taxe est, en France métropolitaine, de :
- 4,25 % pour la fraction de la rémunération individuelle qui n’excède pas 7 604 € ;
- 9,35 % pour la fraction comprise entre 7604 € et 15185 € ;
- 13,60 % pour la fraction supérieure à 15185 €. Il n’y a qu’un taux unique de 2,95 % dans les départements de la Guadeloupe, de la Martinique et de la Réunion, et de 2,55 % dans le département de la Guyane.
La charge de cette taxe est relativement lourde pour les associations même si un abattement est prévu en leur faveur. Le montant de cet abattement est de 6002 € pour 2011. Très régulièrement, les parlementaires appellent l’attention du Gouvernement sur la charge que représente cette taxe pour les associations. La réponse du Gouvernement est invariablement la même : « La taxe sur les salaires (TS) permet de soumettre à l’impôt une des composantes de la valeur ajoutée (les salaires) des employeurs qui ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) ou l’ont été sur moins de 90 % de leur chiffre d’affaires ou de leurs recettes. Ce faisant, elle concerne les employeurs qui exercent des activités bénéficiant d’une exonération de la TVA (activités dans les domaines associatifs mais également les activités bancaires et financières, le secteur des assurances…). Cette taxe a un rendement annuel de près de 11,2 MdEUR, étant précisé que l’intégralité de cette somme est affectée au financement de la sécurité sociale depuis l’entrée en vigueur de l’article 54 de la loi de finances pour 2008 (n° 2007-1822). Le doublement de l’abattement de TS prévu à l’article 1679 A du code général des impôts (CGI) en faveur des associations à but non lucratif se traduirait par un manque à gagner de 150 MEUR, au détriment des organismes de sécurité sociale, qui ne paraît pas compatible avec leur actuelle situation financière. Au demeurant, l’abattement spécial de TS, dont le montant s’établira à 6 002 EUR en 2011, permet d’exonérer complètement les associations employant jusqu’à six salariés occupés à temps plein et rémunérés au niveau du SMIC, voire plus en cas de recours au temps partiel. De fait, à son niveau actuel, l’abattement, qui représente un effort budgétaire significatif en faveur du secteur associatif de l’ordre de 250 MEUR, permet déjà à la majorité des associations d’être totalement dispensées du paiement de la TS. Sans méconnaître l’importance du rôle des maisons des jeunes et de la culture, les contraintes budgétaires permettent difficilement d’aller au-delà s’agissant de l’abattement spécial de TS applicable aux associations ».
L’offensive contre la TS a été conduite, sans plus de succès, jusque devant le conseil constitutionnel. Saisi par le Conseil d’État d’une question prioritaire de constitutionnalité posée par l’Association sportive Football Club, laquelle soutenait notamment qu’en mettant la taxe sur les salaires à la charge des seuls personnes ou organismes qui ne sont pas assujettis à la TVA ou ne l’ont pas été sur 90 % au moins de leur chiffre d’affaires, les dispositions de l’article 231 du CGI créaient une distorsion entre des entreprises qui ont la même masse salariale, le Conseil constitutionnel a considéré que ces dispositions ne sont contraires à aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit (Cons. const. 17 septembre 2010 n° 2010-28 QPC, RJF 2010, n° 1214).
Enfin tout dernièrement, la Cour administrative d’appel de Lyon a été saisie deplusieurs recours fondés sur l’incompatibilité de la taxe sur les salaires avec les directives communautaires, faisant valoir notamment que :
- La taxe sur les salaires constitue une taxe cumulative à cascade prohibée et incompatible avec les objectifs poursuivis par le législateur communautaire exposés par la directive n° 67/227 CEE du Conseil de la communauté européenne du 11 avril 1967, en matière d’harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires ;
- l’article 33 de la 6ème directive interdit les taxes sur le chiffre d’affaires, autres que les taxes cumulatives, qui frappent les transactions commerciales d’une façon comparable à celle qui caractérise la taxe sur la valeur ajoutée communautaire ;
- la taxe sur les salaires constitue une taxe sur le chiffre d’affaires dont l’introduction et le maintien sont prohibés en tant qu’elle concurrence la taxe sur la valeur ajoutée dans son principe de fonctionnement, dans ses objectifs ou dans ses effets ; que la taxe sur les salaires est un impôt substitutif de la taxe sur la valeur ajoutée.
La cour administrative d’appel de Lyon a rejeté ces demandes, considérant notamment que :
- la taxe sur les salaires est un impôt direct dont l’assiette est constituée, comme sa dénomination l’indique, par les salaires versés par les assujettis ;
- le montant de cette taxe n’est pas proportionnel aux prix des services et des produits qu’ils fournissent, ainsi, quelle que soit l’importance des salaires dans les facteurs de production des assujettis concernés, elle ne présente pas les caractéristiques essentielles d’une taxe sur le chiffre d’affaires… elle n’est donc pas incompatible avec les objectifs tracés aux articles 1er et 2 précités de la directive européenne du 11 avril 1967, même éclairés par la lecture de ses 2ème, 3ème, 4ème et 8ème considérants ;
- aucune règle communautaire relative à la concurrence ne fait obstacle à l’institution d’une taxe présentant la nature et les règles d’assiette de la taxe sur les salaires critiquée. Les circonstances que la taxe s
ur les salaires pénaliserait les opérations exonérées de TVA, qu’elle aurait des effets économiques négatifs, qu’elle pèserait sur la compétitivité des entreprises assujetties à défaut d’exonération des exportations, ou qu’elle désavantagerait les associations de services ou d’aide à domicile qui la payent alors que les particuliers utilisant le concours d’un seul salarié à domicile ou d’une assistante maternelle en sont exonérés, ne constituent pas une atteinte aux règles communautaires relatives à la concurrence ; - la circonstance que la taxe sur les salaires ne frappe que les entreprises exonérées de TVA ou non soumises à cette taxe sur au moins 90 pour cent de leur chiffre d’affaires n’a pas pour effet de lui conférer le caractère d’une taxe sur le chiffre d’affaires prohibée par l’article 33 de la sixième directive ; qu’eu égard aux différences entre les caractéristiques de ces deux impôts, les circonstances que le champ d’application de la taxe sur les salaires est défini négativement par rapport à celui de la taxe sur la valeur ajoutée, et que son assiette est, en raison de ses modalités de calcul, corrélée au montant ou à la proportion des recettes n’ouvrant pas droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée d’amont ne confèrent pas à la taxe sur les salaires le caractère d’une taxe non autonome par rapport à la TVA. Ces circonstances ne créent pas une situation d’incompatibilité avec les exigences des stipulations de l’article 1er de la 6ème directive CEE et de l’article 1er de la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006. (CAA Lyon, n°10LY01178, 6 janvier 2011, Association Léo Lagrange Rhône-Alpes-Auvergne (LLRAA) ; CAA Lyon, n° 10LY00201, 20 janvier 2011, Caisse de règlements pécuniaires des avocats aux barreaux de Lyon et de l’Ardèche (CARPA) ; CAA Lyon, n° 10LY00202, 20 janvier 2011, Association vie et famille).
Bien entendu, il faut désormais attendre les éventuelles décisions du Conseil d’Etat pour connaître le sort de la taxe sur les salaires, étant observé que si la haute juridiction valide les décisions de la cour administrative d’appel de Lyon, sa légitimité en ressortira renforcée. Restera ensuite le levier politique…
Bernard THEVENET Avocat au Barreau de LYON
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