Le secteur associatif permet d’exercer de nombreuses activités, y compris celles les plus improbables. En guise de démonstration, nous vous présentons les règles juridiques et fiscales liées à la constitution et au fonctionnement d’un centre de santé. A titre d’information, en 2007, 507 centres de santé dentaires étaient dénombrés en France (Source : Recensement enquête nationale 2007).
I – DEFINITION D’UN CENTRE DE SANTÉ
1.1 Délimitation des activités d’un centre de santé
- Soins de premier secours et sans hébergement
Aux termes de l’article L. 6323-1 du Code de la Santé Publique, un centre de santé est une structure sanitaire de proximité dispensant principalement des soins de premiers recours.
Il assure des activités de soins sans hébergement et mène des actions de santé publique ainsi que des actions de prévention, d’éducation pour la santé, d’éducation thérapeutique des patients et des actions sociales.
Attention : Les centres de santé ne pratiquent pas l’anesthésie ou la chirurgie ambulatoire (Article D. 6323-4 du Code de la Santé Publique). Les soins dispensés permettent le retour immédiat du patient à son domicile sans qu’il soit nécessaire d’assurer une surveillance au centre de santé ou après le retour au domicile.
A noter que les centres de santé peuvent être chargés d’assurer ou de contribuer à assurer des missions de service public (par exemple : contribution à la permanence des soins, aux soins dispensés aux détenus en milieu pénitentiaire…).
D’une façon générale, les centres de santé contribuent à la réduction des inégalités d’accès aux soins et à la santé.
- Nature des soins
En vertu des dispositions du décret n°2010-985 du 30 juillet 2010, les centres de santé peuvent fournir des consultations ou prodiguer des actes de prévention, d’investigation, des actes médicaux, paramédicaux ou dentaires (Code de la Santé Publique, article D. 6323-2).
Il est évident que toute activité relevant de l’art dentaire se doit d’être pratiquée par un professionnel inscrit à l’ordre des chirurgiens-dentistes, et que toute prothèse dentaire doit être réalisée par un prothésiste dentaire diplômé, dans la mesure où il s’agit d’une activité réglementée.
1.2 Mode de gestion
Un centre de santé est créé et géré soit par un organisme sans but lucratif, soit par une collectivité territoriale, soit par un établissement de santé public ou un établissement de santé d’intérêt collectif(Code de la Santé Publique, article L. 6323-1).
1.3 Conclusion sur la faisabilité juridique d’un projet de création de centre de soins dentaires
Le projet réside dans la création, sous forme associative, d’un centre de soins dentaires (offrant des soins prothétiques, d’implantologie, d’orthodontie, etc.) lequel, destiné à accueillir tous publics, aura néanmoins pour objectif de s’adresser principalement à une population défavorisée. Une partie de l’activité s’adressera d’ailleurs aux bénéficiaires de la CMU.
Au regard de ces éléments, et d’après les informations dont nous disposons, le centre de santé devra répondre aux prescriptions légales suivantes, à savoir :
– être une structure sanitaire de proximité ;
– avoir une activité entrant dans le champ d’intervention des centres de santé (en l’occurrence, soins dentaires) ;
– être géré par un organisme sans but lucratif ;
– avoir un objectif de réduction des inégalités d’accès aux soins.
Il est par conséquent tout à fait possible de fonder un centre de santé dentaire sous forme associative, sous réserve, évidemment, de respecter l’intégralité des dispositions de Code de la Santé Publique applicables (à savoir notamment, la limitation des prestations fournies par le centre à des soins sans hébergement, sans anesthésie et chirurgie ambulatoire).
II – CONSTITUTION ET FONCTIONNEMENT D’UN CENTRE DE SANTÉ GERÉ SOUS FORME ASSOCIATIVE
2.1 Constitution d’une association
La réalisation du projet de création d’un centre de santé supposera en premier lieu la création d’une association régie par la loi de 1901 laquelle aura pour objet la gestion d’un centre de soins dentaires.
Les statuts de l’association contiendront toutes les dispositions relatives aux conditions d’adhésion des membres, aux ressources de l’association, à l’organisation de l’administration et au fonctionnement de l’organisme (assemblées générales, modalités de convocation et de vote…).
Aucune disposition légale ne prévoit actuellement d’obligation quant à la composition de la gouvernance d’une association gestionnaire d’un centre de santé ou quant à son organisation interne. Toutefois, il conviendra, pour plus de crédibilité, d’inclure au sein du Conseil d’Administration de la structure des professionnels salariés du centre et éventuellement des partenaires institutionnels (ville, conseil général…).
Les statuts seront par la suite déposés en préfecture afin que la structure acquière une personnalité juridique.
2.2 Etablissement d’un projet de santé
L’article L. 6323-1 du Code de la Santé Publique impose à tout centre de santé l’établissement d’un « projet de santé » lors de son ouverture, qui constituera une véritable fiche d’identité de la structure.
Un arrêté du 30 juillet 2010 est venu préciser le contenu de ce « projet de santé ». Il doit ainsi contenir :
– Les coordonnées du centre de santé et ses principales caractéristiques ;
– Le nom du centre, son adresse postale et celle de son siège social, ses numéros de téléphone et de télécopie, son numéro SIREN, sa localisation et, le cas échéant, celle des différents sites le composant, le nom de son responsable administratif, le nom et le statut de son organisme gestionnaire ainsi que le nom du responsable de cet organisme ;
– La liste des professionnels exerçant au sein du centre, les diplômes ou équivalences dont ils sont détenteurs ainsi que les effectifs en équivalents temps plein ;
– Les jours et heures d\’ouverture et de fermeture du centre de santé ;
– Les activités assurées en son sein et le temps proposé au public pour chaque activité. Le cas échéant, il précise les activités éventuellement hébergées sur le site du centre de santé ;
– Les objectifs et l\’organisation du centre de santé au regard notamment des populations et des pathologies prises en charge, des problématiques de santé du territoire, des professionnels concernés, des modalités de la continuité des soins, de la coordination des soins et, le cas échéant, de la participation des médecins du centre à la permanence des soins. Il tient compte en particulier de l\’accès aux soins des personnes en situation de précarité et des personnes en situation de handicap, quel que soit leur âge ;
– Les modalités d\’accès aux données médicales des patients ;
– Le dispositif d\’évaluation de la qualité des soins ;
– Les coopérations nouées avec des structures ou professionnels participant à la prise en charge des patients.
Le projet de santé est arrêté par le gestionnaire du centre de santé (en l’espèce, l’association) qui associe l’ensemble des professionnels du centre pour son établissement.
Il est par la suite transmis à l’Agence Régionale de Santé (ARS) lors de l’ouverture du centre et lors de toute modification portant sur l’activité, l’implantation ou le gestionnaire du centre.
III – FISCALITE D’UN CENTRE DE SANTÉ ASSOCIATIF
A l’instar de toute association, un centre de santé ne sera soumis aux impôts commerciaux (Impôt sur les sociétés, TVA, Contribution Economique Territoriale) que si son activité est reconnue par l’administration fiscale comme étant lucrative.
La lucrativité d’une association gérant un centre de santé se déterminera au regard des critères suivants (Instruction fiscale du 18 décembre 2006, BOI n° 208, 4 H-5-06) :
– du caractère intéressé ou non de sa gestion ;
– de l’existence ou non d’un secteur d’activité concurrentiel ;
– des modalités d’exercice in concreto des activités de l’association par application de la règle des 4 « P » : produit, public, prix et publicité.
Colas AMBLARD, Avocat
En savoir plus :
« Centres de soins dentaires associatif : un schéma toujours attractif » ISBL MAGAZINE 26 juin 2018
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