TEXTE DE LA QUESTION n° 0912S publiée dans le JO Sénat du 22/08/2019, p. 4263
M. Daniel Gremillet (Vosges – Les Républicains) appelle l’attention de M. le ministre de l’économie et des finances sur l’assujettissement à la taxe foncière sur les propriétés bâties des associations à but non lucratif propriétaires de musées.
D’un point de vue fiscal, les musées sont assimilés à des locaux commerciaux et suivent les règles d’évaluation des locaux à usage professionnel.
Dans la plupart des cas, les musées appartiennent à des collectivités territoriales et bénéficient de l’exonération permanente de taxe foncière au titre des propriétés publiques, en application du 1° de l’article 1382 du code général des impôts.
Néanmoins, un certain nombre de musées sont détenus par des associations à but non lucratif qui en assurent l’entretien, la restauration, la gestion, en même temps que la survie, en particulier lorsqu’elles en font l’acquisition.
Si les associations à but non lucratif gérant des musées ne sont pas assujetties à la cotisation foncière des entreprises (CFE) à l’instar des musées publics, elles sont soumises à la taxe foncière sur les propriétés bâties dès lors qu’elles sont propriétaires du local accueillant le musée en question. Cette imposition constitue une indéniable charge pour ces associations et met bien souvent en péril leur avenir.
En tout état de cause, les associations propriétaires de musées ne font pas ou peu de bénéfices, et les faibles recettes des entrées ne parviennent généralement pas à couvrir les frais liés au seul entretien des locaux.
En revanche, l’ensemble de ces structures associatives jouent un rôle déterminant dans la préservation du patrimoine et l’accès à la culture au public le plus large, en particulier dans les territoires ruraux.
Les soumettre à la taxe foncière sur les propriétés bâties revient à les mettre en situation de grande fragilité et à remettre en cause la gestion de leurs activités culturelles bénévoles et d’intérêt public.
Aussi, compte tenu de leurs difficultés de plus en plus importantes et de la richesse qu’elles représentent pour l’attractivité touristique des régions et de la France, il lui demande si le Gouvernement envisage d’exonérer les associations à but non lucratif propriétaires de musées de la taxe foncière sur les propriétés bâties, soit en leur accordant un abattement significatif, soit en prévoyant de les faire entrer dans le champ du 1° de l’article 1382 du code général des impôts, et ce afin d’encourager la préservation du patrimoine et de favoriser l’activité muséographique en France.
TEXTE DE LA RÉPONSE Réponse du Secrétariat d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics publiée dans le JO Sénat du 16/10/2019, p. 13129
M. Daniel Gremillet. J’appelle l’attention du Gouvernement sur le cas spécifique des associations à but non lucratif propriétaires de musées assujettis à la taxe foncière sur les propriétés bâties.
Ne pouvant entrer dans le champ d’application de l’article 1382 du code général des impôts, les musées détenus par des associations sont pleinement soumis à la taxe foncière sur les propriétés bâties. Cette imposition constitue une indéniable charge pour les associations propriétaires et met en péril leur avenir.
Cette situation interpelle particulièrement, puisqu’elle vient pénaliser des activités à but non lucratif, qui reposent sur le bénévolat et dont la portée est d’intérêt général. Les associations propriétaires de musées ne font pas de bénéfices ou en font très peu – d’ailleurs, les éventuels bénéfices sont immédiatement réinvestis.
Je prendrai pour exemple l’association Musée de Châtillon-sur-Saône, dans les Vosges, qui a acheté en 1990 deux maisons en ruines dans ce village de 140 habitants. Elle les a restaurées, puis aménagées en un écomusée, qui met aujourd’hui en valeur l’histoire, les traditions et le patrimoine de l’ancienne cité fortifiée de Châtillon-sur-Saône.
Reposant sur le seul dévouement des bénévoles, ce musée ne dispose pas des moyens suffisants pour équiper les locaux de toilettes ou d’évacuation d’eau. Les recettes des entrées ne couvrent pas davantage les frais d’entretien et de gardiennage. Seules les fêtes et les animations de rue organisées tout au long de l’année par les bénévoles permettent de pallier en partie ces besoins.
Malheureusement, cet équilibre précaire se trouve directement remis en cause par l’assujettissement de l’association à la taxe foncière, dont le taux est croissant et devrait atteindre un montant de 1 000 euros, somme considérable pour une aussi petite structure.
J’aurais également pu citer le cas de l’association Fonderie et clochers du pays de Robécourt, dont l’avenir est, de la même manière, remis en cause.
Aussi, monsieur le secrétaire d’État, au regard du rôle majeur que ces associations jouent en faveur de la préservation du patrimoine et de l’accès du plus grand nombre à la culture, je souhaiterais savoir si un aménagement fiscal était envisageable pour répondre à ces difficultés.
Comme vous le savez, la taxe foncière sur les propriétés bâties est un impôt réel dû à raison de la détention d’un bien, quels que soient l’utilisation qui en est faite ou les revenus du propriétaire. Les exonérations de taxe foncière sur les propriétés bâties doivent rester une exception – c’est la doctrine constante que nous observons.
Par ailleurs, je souligne que, si les immeubles qui appartiennent à l’État, aux collectivités territoriales, à leurs groupements ou à des établissements publics d’assistance scientifique ou d’enseignement sont exonérés de taxe foncière sur les propriétés bâties, c’est à la double condition d’être affectés à une mission de service public et d’être improductifs de revenus pour le propriétaire des bâtiments. Ce sont ces sujétions qui justifient la différence de traitement entre établissements publics et privés, quand bien même, vous l’avez souligné, les revenus tirés de ces bâtiments restent modestes, ne suffisant pas forcément à faire face à un certain nombre de charges.
En outre, si nous accédions à cette demande, des mesures similaires pourraient être sollicitées par d’autres structures associatives d’utilité générale, certainement tout aussi dignes d’intérêt, sans que nous puissions en maîtriser les impacts budgétaires.
Enfin, un tel allégement fiscal induirait une perte de ressources pour les collectivités territoriales, ce qui n’est évidemment pas souhaitable. C’est la question que nous devons nous poser chaque fois qu’une exonération de fiscalité locale est accordée.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement n’est pas favorable à l’aménagement que vous appelez de vos vœux. Je précise cependant que, si les valeurs locatives d’un bien paraissent surestimées par rapport à son état ou à sa situation, des possibilités de faire valoir une demande de réévaluation auprès du service des finances publiques existent, de telle manière que le niveau de l’imposition soit plus conforme à la valeur du bien détenu.
M. Daniel Gremillet. Monsieur le secrétaire d’État, dans cette collectivité de 140 habitants, les maisons étaient en ruines et ont été reconstruites, jour après jour, par des bonnes volontés. Il n’y a pas de bénéfices : tout tient par le bénévolat, c’est-à-dire par des femmes et des hommes qui consacrent leur temps à l’animation et à la mise en valeur du patrimoine.
Faites quelque chose ! Il s’agit non pas d’enrichissement, mais de mise en valeur du patrimoine de notre territoire.
source : http://www.senat.fr
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