Depuis le 31 janvier 2012, les nouvelles règles communautaires du « Paquet Almunia » relatives aux aides publiques sont entrées en application. Retrouvez l’interview donnée par Me Colas Amblard dans la Revue Sport & Stratégies (n°293, mars 2012), au nom du Cabinet d’avocats NPS CONSULTING, à propos des conséquences à prévoir pour les clubs sportifs.
Pour les associations sportives, les conséquences ne seront pas neutres dans la mesure où le montant des aides perçues excèdera un certain plafond. Les petites subventions, en revanche, restent en dehors du champ d’application du texte adopté par la Commission européenne. Pour le plus grand bonheur des collectivités locales qui s’épargnent ainsi les complications d’un régime juridique européen jugé peu opérationnel par bon nombre d’observateurs. Explication de Me Colas Amblard, avocat associé au sein du Cabinet d’avocats NPS CONSULTING.
Revue Sport et Stratégies : Quelles sont les conséquences du paquet Almunia pour les associations sportives ?
Colas Amblard : Certaines avancées sont positives, même si on peut critiquer le fait que tout se construit autour du principe de libre concurrence. Aujourd’hui, le principe du droit communautaire pour les aides d’État est qu’on ne peut plus financer sur l’argent public une entreprise associative. En droit interne français, la cour d’appel de Versailles a même retenu fin 2011 qu’une fédération sportive est une entreprise. À ce titre les aides financières apportées à une association, dans l’esprit de la législation européenne, sont susceptibles de menacer le principe de libre concurrence.
Le paquet Almunia permet désormais de ne plus tenir compte des petites compensations de service public, c’est-à-dire celles qui n’affectent pas les échanges entre états membres ou qui ne faussent pas la concurrence.
Ces Services économiques d’intérêt général (SIEG) entre une collectivité et une association sportive ne sont pas impactés par le droit communautaire dès lors qu’ils ne dépassent pas la limite de 500.000 € sur trois ans. Sous cette limite, on considère que le droit communautaire ne s’applique pas. Avant le 31 janvier 2012, le seuil était de 200 000 €. Le nouveau seuil sera fixé prochainement, sûrement à hauteur de 500 000 €.
Cela concerne in fine pas mal d’associations sportives et de petits clubs. En revanche, des fédérations sportives ou des comités départementaux dépassent facilement cette barrière (1).
Dans quelle mesure peut-on dire que les associations sportives remplissent un Service économique d’intérêt général ?
CA : Prenons un exemple. Dans la mesure où un club de tennis se situe sur le marché concurrentiel de l’enseignement du tennis, il est concerné par les SIEG si on considère que cette activité économique a une dimension collective d’intérêt général. C’est grâce à cette dimension qu’il retrouve le droit de toucher des aides publiques. En droit communautaire, on ne parle d’ailleurs plus de subvention, mais de compensation de service public car on considère qu’il ne s’agit pas d’un cadre économique lambda, mais d’intérêt général qui justifie ces dérogations. Dès lors, le principe de libre concurrence est respecté dans la mesure où la somme versée au club est l’équivalent de cette compensation de service public. Le droit communautaire interdit d’ailleurs toutes les formes de surcompensation. En surcompensant, on contredirait à nouveau le principe de libre concurrence.
Pourtant, la France ne définit pas précisément la notion de SIEG…
CA : Le droit communautaire intègre un principe de subsidiarité, c’est-à-dire le droit pour les états membres de définir ce qu’ils considèrent comme relevant de l’intérêt général. Toute activité d’intérêt général permet de déroger au principe de libre concurrence, mais l’État français ne veut pas définir le concept de SIEG. On est donc dans l’application pure et dure du droit communautaire, lequel laisse beaucoup de place au principe de libre concurrence.
Quels sont les inconvénients du paquet Almunia ?
CA : Avec le paquet Almunia, pour financer un SIEG, il faut au préalable que la collectivité procède par voie de mandatement. Avant, pour obtenir une subvention, une association allait voir la collectivité sur la base d’un projet. Si celui-ci était considéré d’intérêt général, la collectivité versait une subvention. Maintenant, c’est la collectivité qui doit affirmer par voie de mandatement qu’elle a un besoin d’intérêt général dans un secteur donné. Les associations doivent cadrer avec le mandatement pour toucher des financements publics. Le problème est que cette procédure de mandatement est imprécise. Sa définition est floue et rend son application peu opérationnelle. Les collectivités ne vont pas vouloir prendre le risque de s’exposer à une requalification de la procédure de subvention. Elles risquent donc se tourner vers des procédures qu’elles maitrisent, à savoir celles du marché public et de la délégation de service public. Ajoutons qu’entre une procédure de marché public, où on a un achat public, et la procédure de mandatement dans le cadre d’un SIEG, la frontière est mince. Le mandatement définit en effet un programme d’activité auquel une association peut répondre. On est quasiment dans un cadre de marché public où la collectivité définit un besoin et cherche un opérateur pour y répondre.
Source : Revue Sport & Stratégies Interview réalisée par Charles Knappek
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C. Amblard, « Paquet Almunia : les nouvelles règles communautaires applicables aux associations à partir du 31 janvier 2012 », ISBL consultants, 31 janvier 2012 : voir en ligne
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Notes:
[1] La Circulaire Fillon du 18 décembre 2010 précise toutefois que « l’activité (...) de fédération n’est pas a priori économique ni susceptible d’affecter les échanges, mais une analyse au cas par cas devra toutefois permettre de l’établir »