La question de l’appartenance des fonds de dotation (FDD) au secteur de l’Economie sociale et solidaire (ESS) est complexe. Il convient d’appréhender sa définition légale et d’identifier son régime juridique (I) pour tenter de résoudre cette problématique juridique. En effet, si a priori cet organisme dédié à l’intérêt général n’entre pas dans le périmètre de l’ESS (II), rien ne l’empêche cependant. Tout dépendra de la volonté des fondateurs de respecter les critères légaux d’appartenance à ce secteur tels que définis par la loi du 31 juillet 2014 relative à l’ESS. En tout état de cause, le FDD est probablement appelé à rejoindre la famille statutaire de l’ESS, à l’instar des fondations, comme le préconise le rapport « Tiberghien » d’évaluation de la loi du 31 juillet 2014 par le Conseil supérieur à l’ESS (p.10).
I – Fonds de dotation : définition et régime juridique applicable
Il convient de s’attarder sur la définition légale (A) et le régime juridique applicable au FDD (B) avant de confronter cet organisme sans but lucratif (OSBL) au périmètre des entreprises de l’ESS.
A – Définition légale
Par conséquent, la mission légale des FDD consiste prioritairement à « attirer les financements privés »[1]MINEFI, http://www.modernisationeconomie.fr/presse/lme_disc081119.html sous forme de libéralités (don et legs) afin de, soit financer directement des opérations d’intérêt général[2]CGI, art. 200 qu’il réalise lui-même directement, soit financer des organismes à but non lucratif[3]BOI -TVA-CHAMP-30-10-30-10, par. 50 tels que les associations, congrégations, fondations, groupements mutualistes, ou encore les comités d’entreprise ou d’établissement. Dans le premier cas, il s’agira d’un fonds « opérateur » et, dans le second cas, d’un fonds « redistributeur », étant entendu qu’un même fonds peut statutairement prévoir d’exercer conjointement ces deux missions et, dans ce cas, on parlera d’un fonds « mixte. » En tout état de cause, pour pleinement réaliser ses missions légales, le FDD ainsi que les éventuels OSBL qui recevront des soutiens financiers de sa part devront remplir l’ensemble des critères requis pour bénéficier du régime de mécénat[4]L. 2003-709 du 1er août 2003 à savoir, ne procéder à aucun partage de bénéfices entre leurs membres, exercer à titre principal une activité d’intérêt général[5]Ibid note 3, avoir une gestion désintéressée, poursuivre un but non lucratif et ne pas fonctionner au bénéfice d’un cercle restreint de membres[6]CGI, art. 238 bis. Sous réserve de respecter ces conditions, les FDD ainsi que les mécènes bénéficieront d’un régime fiscal de faveur (cf infra I, B, 7).
B – Legislation applicable
Outre les dispositions légales précitées, le FDD est également régi par un certain nombre des dispositions réglementaires[7]D. 2009-158 du 11 février 2009 ; Circ. ECEM0908677C du 19 mai 2009 (JORFn°010 du 19 juin) ; Circulaire NOR IOC/D/10/02052/C du 22 janvier 2010 ; Circulaire NOR/10C/D/10/ 31294/C du 3 décembre … Continue reading dont la dernière en date est le décret 2022-816 du 22 mai 2022 pris en application de la loi 2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République[8]C. Amblard, Evolution du dispositif et renforcement du contrôle administratif, extrait du dossier Financement privé – opération mécénat, Ed. Juris associations Dalloz, 15 sept. 2022, n°664, … Continue reading.
1. Eléments constitutifs
Un FDD est constitué par un ou plusieurs fondateurs, qui peu(ven)t être toute(s) personne(s) physique(s) ou morale(s) de droit privé (association, entreprise commerciale) ou public (Etat, collectivité territoriale, établissement public), dès lors que celle-ci dispose de la capacité d’effectuer une libéralité avec charge. S’agissant des collectivités territoriales ou des établissements publics, s’ils disposent bien de cette capacité, en revanche ils ne pourront apporter aucun fonds publics sauf autorisation ministérielle exceptionnelle[9]L. 2008-776 préc., art. 140, III, al. 3 ; C. comptes 2ème ch. 14 Sept. 2015 n°72674. Le ou les fondateurs devront verser une dotation initiale d’au moins 15.000 euros en numéraire au cours du premier exercice comptable[10]D. 2022-813 préc., art. 4. Cette dotation minimale pourra, le cas échéant, être complétée par toutes formes de libéralités (biens corporels ou incorporels) apportées de manière gratuite et irrévocable (don ou legs).
2. Statuts
Le FDD est généralement présenté comme « un outil à mi-chemin entre fondation et association » dans la mesure où il « se créé comme une association et se finance comme une fondation. »[11]C. Bergeal, Conseiller d’Etat, directrice des affaires juridiques du ministère de l’Economie, des finances et de l’industrie, N’ayez pas peur des fonds de dotation ! Juris associations, 15 … Continue reading. Il conviendra dès lors de déposer des statuts en préfecture qui devront librement prévoir l’organisation et le fonctionnement du fonds[12]Circ. économie ECEM0908677C du 19 mai 2009, art. I-2 et ann. 1. Outre les éléments statutaires classiques (dénomination, objet, durée, siège, modalités de dissolution), les fondateurs devront en outre nommer au moins trois administrateurs au moment de la constitution du fonds, prévoir les conditions de désignation de son président, la composition et les modalités de fonctionnement de son comité consultatif, obligatoire lorsque les donations dépassent un million d’euros.
Enfin, pour que la dotation soit consomptible – à défaut le fonds ne pourra utiliser que les fruits de la capitalisation (sur les conséquences fiscales, cf infra I, B, 7 a) – il faudra l’avoir expressément prévu dans les statuts. Sous ces réserves, la rédaction des statuts est libre et les fondateurs pourront se référer au clausier proposé par le comité stratégique des fonds de dotation[13]Circ. 3 déc. 2010 relative aux onze recommandations du comité stratégique. La publication des statuts au Journal officiel a pour effet de conférer la capacité juridique aux fonds de dotation qui pourra alors ouvrir un compte bancaire et débuter sa mission d’intérêt général.
Par ailleurs, le FDD dispose d’une pleine capacité juridique pour développer des activités de vente de biens et/ou de prestations de services, comme moyens d’action supplémentaires (sur les conséquences fiscales, cf infra I, 7, a). La réalisation à titre habituel de ce type d’activités complémentaires confèrera au fonds la qualité d’entreprise (cf infra II, B). Dès lors, il est conseillé au FDD de mentionner expressément dans ses statuts la mise en œuvre de ces moyens d’action supplémentaires[14]C. com. art. L 442-7 afin de se prémunir contre toute action en concurrence déloyale[15]C. civ. art 1134.
3. Fonctionnement
A minima, le fonctionnement du fonds de dotation reposera donc sur un conseil d’administration qui dispose de tous les pouvoirs de gestion. Celui-ci nomme le président en qualité de représentant légal ainsi que les membres du comité consultatif, en tant que de besoin, qui sont des personnes extérieures au conseil d’administration et qui ont pour mission de formuler des propositions de politique d’investissement et d’en assurer le suivi ; ils peuvent également proposer des études et des expertises[16]D. 2009-158 préc., art. 2. Par délégation, une partie de la gestion du fonds pourra être déléguée à un directeur général salarié.
4. Ressources et gestion financière
A la dotation initiale, s’ajoutent les dons et les legs qui seront ultérieurement consentis au fonds en cours de vie (mécénat de flux). Le préfet ne dispose pas du pouvoir de s’opposer à l’intégration de ces libéralités[17]L. 2008-776 préc., art. 140-III, al. 1. Seul le lancement d’une campagne d’appel à la générosité du public oblige le fonds à déposer en préfecture une demande d’autorisation préalable[18]D. 2009-158 préc., art. 11.
C’est cet ensemble de moyens financiers (dotation initiale, mécénat de flux et revenus du patrimoine) qui devra servir à financer les missions d’intérêt général décrites dans l’objet social du fonds. Pour cela, il lui appartiendra notamment de faire fructifier la partie disponible de son patrimoine en respectant obligatoirement la règle de dispersion par catégories de placements et de limitation par émetteur. En outre, les actifs éligibles aux placements sont les valeurs mobilières et titres assimilés, les actifs immobiliers ainsi que les prêts et dépôts énumérés à l’article R 332-2 du Code des assurances
Ces ressources du FDD pourront être complétées par les produits des activités autorisées par ses statuts et des rétributions pour services rendus (sur les conséquences fiscales, cf infra I, 7, a) et, éventuellement des appels à la générosité du public[19]L. 2008-776 préc., art. 140-III, al. 5 ; D. 2009-158 préc., art. 6. En revanche, il ne pourra percevoir ni cotisations, ni subventions publiques (sauf circonstances exceptionnelles pour une œuvre ou un programme d’actions déterminé compte tenu de son importance ou de sa particularité et après accord conjoint exprès des ministres chargés de l’économie et du budget.)[20]L. 2008-776 préc, art. 140-III, al. 3. Pour cela, le FDD devra envisager sa transformation en fondation reconnue d’utilité publique (cf infra II, B, 6)[21]L. 87-571 du 23 juillet 1987 sur le développement du mécénat (modif.), art. 18.
5. Contrôle et transparence financière
Le FDD doit obligatoirement établir des comptes annuels conforme au règlement ANC 2018-06 comprenant au moins un bilan et un compte de résultats ainsi qu’une annexe comportant un compte d’emploi annuel des ressources (CER), s’il a collecté plus de 153 000 euros de dons à la suite d’un appel à la générosité du public[22]Ibid, art. 140-VI, al. 3. Au-delà de 10.000 euros de ressources, ils doivent nommer au moins un commissaire aux comptes et un suppléant s’ils sont une structure unipersonnelle. Ils effectuent leur mission légale de certification des comptes et de vérification de concordance avec le rapport d’activité conformément à l’article 820-1-1 du code de commerce et ce, à partir des comptes annuels et du rapport d’activité qui doivent être leur être remis au moins 45 jours avant la date de réunion du conseil d’administration convoqué pour leur approbation. Au cours de sa mission, s’il constate des faits de nature à compromette l’activité du fonds, il peut déclencher une procédure d’alerte pouvant aller jusqu’à saisir le préfet pour information[23]Ibid, art. 140-VI.
Dans les six mois de la clôture de l’exercice comptable, le fonds doit adresser au préfet les comptes annuels et, le cas échéant le rapport du commissaire aux comptes, ainsi que son rapport d’activité[24]Un modèle de rapport d’activité est disponible sur le portail MINEFI : www.economie.gouv.fr/daj/fonds-dotation comprenant le CER si nécessaire ; durant toute la vie du fonds, ce dernier peut se faire communiquer tous documents et procéder à toutes investigations utiles[25]L. 2008-776 préc., art. 140-V bis et VI al. 1 ; D. 2009-158, art. 4, al. 1 et 8 et, s’il constate que des dysfonctionnements affectant la réalisation de l’objet statutaire du fonds[26]D. 2022-813 préc., art. 12 il peut, après mise en demeure non suivie d’effet dans les deux mois, suspendre l’activité du fonds pour une durée pouvant aller jusqu’à six mois, renouvelable une fois et, le cas échéant, saisir l’autorité judiciaire aux fins de dissolution.
En matière de transparence financière, le décret 2022-813 du 16 mai 2022 est venu renforcer la transparence financière des fonds de dotation, notamment en ce qui concerne l’obligation de publication des comptes annuels et le contenu du rapport annuel d’activité.
6. Transformation et dissolution
Un fonds de dotation peut opérer sa transformation en une fondation reconnue d’utilité publique sans donner lieu à dissolution ou à la création d’une personne morale nouvelle[27]L. 2008-776 préc., art. 140-XI al. 1 modif. par L. 2014-856 du 31 juill. 2014, art. 87 ; la création d’un fonds pourra ainsi être envisagée comme préfiguration d’une future fondation (cf infra I, B, 1) . Cette transformation prendra effet après parution d’un décret en Conseil d’Etat accordant la reconnaissance d’utilité publique[28]L. 87-571 du 23 juill. 1987, art. 20-2 et 20-3.
Les causes de la dissolution d’un fonds de dotation sont multiples : elle peut survenir à l’arrivée du terme lorsque le fonds est à durée déterminée ou lorsque son objet statutaire est réalisé ; par une décision volontaire de son conseil d’administration ou sur décision de justice (cf supra I, A, 2.6). Quelle que soit la cause, la dissolution doit obligatoirement donner lieu à publication au journal officiel[29]L. 2008-776 préc., art. 140-VIII, al. 1 ; D. 2009-158 préc., art. 14 et le boni de liquidation sera affecté soit à une autre fonds de dotation, soit à une fondation reconnue d’utilité publique[30]L. 2008-776 préc., art. 140-VIII, al. 3.
7. Régime fiscal
a. Régime applicable aux activités du fonds
Le régime fiscal applicable au FDD est globalement identique à celui des associations et autres organismes sans but lucratif[31]BOI-IS-CHAMP-10-50-30-50 du 04 avr. 2018, par. 50 et s., à savoir que pour préserver son statut de non-assujetti aux impôts commerciaux (impôt sur les sociétés, taxe sur la valeur ajoutée), il lui appartient de respecter les critères suivants : sa gestion doit être désintéressée, toute activité donnant lieu à rémunération doit être, soit non-concurrentielle, soit d’utilité sociale (critère du « produit » et du « public »). En outre, les prix pratiqués doivent être homologués par la puissance publique ou « nettement inférieurs au prix du marché », enfin, il devra éviter toute publicité commerciale en application de la règle des « 4 P »[32]BOI-IS-CHAMP-10-50-10-20 du 07 juin 2017. En d’autres termes, comme les associations, un fonds de dotation peut réaliser des activités économiques d’utilité sociale[33]C. Amblard, Activité économique et commerciale des associations, Lamy associations, Etude 246 sans aucune limitation de chiffre d’affaires tout en préservant son statut d’organisme non soumis aux impôts commerciaux.
En outre, le fonds de dotation est en droit de développer des activités lucratives à titre habituelle (cf supra I, B, 2), soit à titre accessoire dans la limite de la franchise commerciale de 73.518 euros[34]https://bofip.impots.gouv.fr/bofip/13498-PGP.html/ACTU-2022-00028, soit à titre non prépondérante dans l’hypothèse de sectorisation comptable[35]BOI-IS-CHAMP-10-50-20-10 du 03 oct. 2018, par. 120 et s.. A cela, il faut encore ajouter la possibilité de développer des manifestations exceptionnelles dans la limite de six par an et l’ensemble des produits dégagés à cette occasion bénéficiera, sans aucune limite, d’une exonération liée[36]CGI, art. 261, 7, 1° c.
b. Régime applicable aux libéralités et revenus du patrimoine
S’agissant des libéralités reçues, ces dernières sont exonérées de droit de donation ou succession lorsqu’elles répondent aux conditions pour bénéficier du mécénat[37]CGI, art. 795, 14°.Les mécènes pourront quant à eux bénéficier de ce régime des réduction d’impôt sur le revenu pour les particuliers[38]Soit 66% de la valeur du don dans la limite de 20% des revenus annuels (hors exception) ; ou 75% dans une limite forfaitaire annuellement révisable pour certains organismes listés (CGI, art. à … Continue reading et sur l’impôt sur les sociétés pour les entreprises[39]Soit 60% de la valeur du don – 40% à partir de 2 millions d’euros – dans la limite de 0,5% du chiffre d’affaires annuel hors taxe ou 20.000 euros si cette limite est plus favorable (hors … Continue reading.
S’agissant des revenus du patrimoine générés par les dotations, ils sont assujettis à l’impôt sur les sociétés au taux réduit[40]CGI, art. 206-5, sauf si le fonds a statutairement opté pour une dotation non-consomptible auquel cas ces revenus seront placés hors champ d’application de cet impôt[41]BOI-IS-CHAMP-10-50-10-40 du 10 mars 2013, par. 570.
II. Fonds de dotation : une entreprise de l’ess ?
Attardons-nous sur le périmètre légal du secteur ESS (A) avant de s’interroger sur le FDD en qualité d’entreprise relevant de ce secteur (B).
A. Rappel du perimetre ESS
Pour mémoire, l’article 1 I et II de la loi du 31 juillet 2014[42]L. n°2014-856 du 31 juill. 2014 relative à l’économie sociale et solidaire définit successivement deux approches du périmètre de l’ESS :
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- Article 1, II: « il s’agit d’un mode d’entreprendre et de développement économique adapté à tous les domaines de l’activité humaine auquel adhèrent des personnes morales de droit privé qui remplissent les conditions cumulatives suivantes :
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- Un but poursuivi autre que le seul partage des bénéfices ;
- Une gouvernance démocratique, définie et organisée par les statuts, prévoyant l’information et la participation, dont l’expression n’est pas seulement liée à leur apport en capital ou au montant de leur contribution financière, des associés, des salariés et des parties prenantes aux réalisations de l’entreprise ;
- Une gestion conforme aux principes suivants : les bénéfices sont majoritairement consacrés à l’objectif de maintien ou de développement de l’activité de l’entreprise et les réserves obligatoires constituées, impartageables, ne peuvent pas être distribuées ; en cas de liquidation ou, le cas échéant, en cas de dissolution, l’ensemble du boni de liquidation est dévolu soit à une autre entreprise de l’économie sociale et solidaire au sens du présent article, soit dans les conditions prévues par les dispositions législatives et réglementaires spéciales qui régissent la catégorie de personne morale de droit privé faisant l’objet de la liquidation ou de la dissolution.(…) »
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- Article 1, II: « il s’agit personnes morales de droit privé constituées sous la forme de coopératives, de mutuelles ou d’unions relevant du code de la mutualité ou de sociétés d’assurance mutuelles relevant du code des assurances, de fondations ou d’associations régies par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association ou, le cas échéant, par le code civil local applicable aux départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle exerçant des activités de production, de transformation, de distribution, d’échange et de consommation de biens ou de services mises en œuvre. (…) »
B. Spécificités rédhibitoires du fonds de dotation
En tout état de cause, le législateur n’a pas expressément prévu d’intégrer ce type d’OSBL dans la liste des entreprises de l’ESS en considération de leurs statuts (art. 1, II), à l’instar des associations, des fondations, des mutuelles et des coopératives, Aussi, le FDD peut-il intégrer ce périmètre spécifique d’entreprise par un autre moyen ? A priori, rien ne semble l’en empêcher si les conditions posées à l’article 1, II de la loi du 31 juillet sont intégralement respectées ce qui suppose que le fonds de dotation développe les spécificités suivantes :
- Il réalise des activités économiques d’utilité sociale ou des activités lucratives accessoires (cf supra I, A, 2.4) ;
- Il adopte un fonctionnement démocratique en intégrant toutes les parties prenantes à ses projets d’intérêt général.
L’une et l’autre de ces spécificités suppose un effort particulier de la part du fonds de dotation dans la mesure où :
- D’une part, l’exercice de ce type d’activités ne relève pas a priori de la mission légale impartie à ce type de structure (cf supra I, A, 1) mais constitue un moyen d’action destiné à développer des ressources complémentaires au mécénat et ;
- D’autre part, il a été précisé dès son origine que dans cette structure le plus souvent unipersonnelle, le fondateur « peut être un dictateur»[43]Ibid note 12 et qu’ « il n’y a pas de membres, d’assemblée générale, de démocratie »[44]Sur ce point, les déclarations faites lors du séminaire pour le développement des fonds de dotation en France, en date du 19 novembre 2008, apparaissent pour le moins contradictoires dans la … Continue reading, à la différence des fondations reconnues d’utilité publique (cf supra I, B, 1) dont l’indépendance vis-à-vis de son ou ses fondateurs[45]Avis CE sect. intérieur 25 oct. 2011 n°385388, 2 juin 2012 n°396331, 12 nov. 2019 n°398776 et 13 oct. 2020 n°400944 – qui ne peu.ven.t disposer que d’un tiers des voix au conseil d’administration[46] Statuts-types I, note 11 ; Avis du CE sect. Intérieur 16 mai 2017 n°393189 – et le fonctionnement démocratique, sont deux conditions sine qua non pour que le Gouvernement[47]Principe général posé par CE 20 mars 1908 : D. 1909 III p. 97, concl. Tardieu autorise leur création.
Pour apparaître au nombre des entreprises de l’ESS, le fonds de dotation devra par conséquent « forcer sa nature profonde » ce qui apparaît parfaitement possible au regard de la liberté statutaire dont il jouit (cf supra I, A, 2.2), et de la capacité juridique dont il dispose pour diversifier ses ressources privées (cf supra I, A, 2.4).
Dès lors, outre la satisfaction d’appartenir à cette économie plus « vertueuse » et de « grossir les rangs » des entités se réclamant des valeurs de l’ESS[48]Fondation de France, Baromètre annuel de la philanthropie, 2022 : Créée en 2008, les fonds de dotations, eux, ont connu une très forte croissance les faisant passer de 0 en 2008 à 2163 en 2021, l’entrée des fonds de dotation dans le périmètre de la loi du 31 juillet 2014 devrait leur permettre de bénéficier des avantages attachés à ce secteur à savoir, la possibilité de bénéficier de prêts solidaires, de crédits spécialisés ou encore de prêts d’honneur, etc.
Colas Amblard, docteur en droit, avocat
En savoir plus :
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References
↑1 | MINEFI, http://www.modernisationeconomie.fr/presse/lme_disc081119.html |
---|---|
↑2 | CGI, art. 200 |
↑3 | BOI -TVA-CHAMP-30-10-30-10, par. 50 |
↑4 | L. 2003-709 du 1er août 2003 |
↑5 | Ibid note 3 |
↑6 | CGI, art. 238 bis |
↑7 | D. 2009-158 du 11 février 2009 ; Circ. ECEM0908677C du 19 mai 2009 (JORFn°010 du 19 juin) ; Circulaire NOR IOC/D/10/02052/C du 22 janvier 2010 ; Circulaire NOR/10C/D/10/ 31294/C du 3 décembre 2010 relative aux onze recommandations du comité stratégique ; Décret n°2015-49 du 22 janvier 2015 |
↑8 | C. Amblard, Evolution du dispositif et renforcement du contrôle administratif, extrait du dossier Financement privé – opération mécénat, Ed. Juris associations Dalloz, 15 sept. 2022, n°664, p. 19 – 24 |
↑9 | L. 2008-776 préc., art. 140, III, al. 3 ; C. comptes 2ème ch. 14 Sept. 2015 n°72674 |
↑10 | D. 2022-813 préc., art. 4 |
↑11 | C. Bergeal, Conseiller d’Etat, directrice des affaires juridiques du ministère de l’Economie, des finances et de l’industrie, N’ayez pas peur des fonds de dotation ! Juris associations, 15 mars 2009, n°395, p.19 |
↑12 | Circ. économie ECEM0908677C du 19 mai 2009, art. I-2 et ann. 1 |
↑13 | Circ. 3 déc. 2010 relative aux onze recommandations du comité stratégique |
↑14 | C. com. art. L 442-7 |
↑15 | C. civ. art 1134 |
↑16 | D. 2009-158 préc., art. 2 |
↑17 | L. 2008-776 préc., art. 140-III, al. 1 |
↑18 | D. 2009-158 préc., art. 11 |
↑19 | L. 2008-776 préc., art. 140-III, al. 5 ; D. 2009-158 préc., art. 6 |
↑20 | L. 2008-776 préc, art. 140-III, al. 3 |
↑21 | L. 87-571 du 23 juillet 1987 sur le développement du mécénat (modif.), art. 18 |
↑22 | Ibid, art. 140-VI, al. 3 |
↑23 | Ibid, art. 140-VI |
↑24 | Un modèle de rapport d’activité est disponible sur le portail MINEFI : www.economie.gouv.fr/daj/fonds-dotation |
↑25 | L. 2008-776 préc., art. 140-V bis et VI al. 1 ; D. 2009-158, art. 4, al. 1 et 8 |
↑26 | D. 2022-813 préc., art. 12 |
↑27 | L. 2008-776 préc., art. 140-XI al. 1 modif. par L. 2014-856 du 31 juill. 2014, art. 87 |
↑28 | L. 87-571 du 23 juill. 1987, art. 20-2 et 20-3 |
↑29 | L. 2008-776 préc., art. 140-VIII, al. 1 ; D. 2009-158 préc., art. 14 |
↑30 | L. 2008-776 préc., art. 140-VIII, al. 3 |
↑31 | BOI-IS-CHAMP-10-50-30-50 du 04 avr. 2018, par. 50 et s. |
↑32 | BOI-IS-CHAMP-10-50-10-20 du 07 juin 2017 |
↑33 | C. Amblard, Activité économique et commerciale des associations, Lamy associations, Etude 246 |
↑34 | https://bofip.impots.gouv.fr/bofip/13498-PGP.html/ACTU-2022-00028 |
↑35 | BOI-IS-CHAMP-10-50-20-10 du 03 oct. 2018, par. 120 et s. |
↑36 | CGI, art. 261, 7, 1° c |
↑37 | CGI, art. 795, 14° |
↑38 | Soit 66% de la valeur du don dans la limite de 20% des revenus annuels (hors exception) ; ou 75% dans une limite forfaitaire annuellement révisable pour certains organismes listés (CGI, art. à l’ar200, 1, ter) |
↑39 | Soit 60% de la valeur du don – 40% à partir de 2 millions d’euros – dans la limite de 0,5% du chiffre d’affaires annuel hors taxe ou 20.000 euros si cette limite est plus favorable (hors exception) |
↑40 | CGI, art. 206-5 |
↑41 | BOI-IS-CHAMP-10-50-10-40 du 10 mars 2013, par. 570 |
↑42 | L. n°2014-856 du 31 juill. 2014 relative à l’économie sociale et solidaire |
↑43 | Ibid note 12 |
↑44 | Sur ce point, les déclarations faites lors du séminaire pour le développement des fonds de dotation en France, en date du 19 novembre 2008, apparaissent pour le moins contradictoires dans la mesure où Madame Christine Lagarde indique que « un fond de dotation se crée comme une association » tandis que Catherine Bergeal précise que le fonds de dotation peut être créé par « une assemblée de (…) différentes personnes » notamment un « regroupement d’associations pour créer entre elles un projet commun » |
↑45 | Avis CE sect. intérieur 25 oct. 2011 n°385388, 2 juin 2012 n°396331, 12 nov. 2019 n°398776 et 13 oct. 2020 n°400944 |
↑46 | Statuts-types I, note 11 ; Avis du CE sect. Intérieur 16 mai 2017 n°393189 |
↑47 | Principe général posé par CE 20 mars 1908 : D. 1909 III p. 97, concl. Tardieu |
↑48 | Fondation de France, Baromètre annuel de la philanthropie, 2022 : Créée en 2008, les fonds de dotations, eux, ont connu une très forte croissance les faisant passer de 0 en 2008 à 2163 en 2021 |