Le secteur associatif français est confronté depuis plusieurs années à une tension accrue sur ses ressources financières. Les associations, fondations et autres organismes sans but lucratif (OSBL) doivent concilier l’exigence de pérennité économique et leur mission d’intérêt général.
Dans ce contexte, la loi n° 2024-344 du 15 avril 2024, visant à soutenir l’engagement bénévole et à simplifier la vie associative, a ouvert deux dispositifs nouveaux :
- Les prêts entre organismes sans but lucratif (article 8),
- Les opérations de trésorerie entre organismes sans but lucratif (article 9).
Les décrets d’application n° 2025-779 et n° 2025-780 du 7 août 2025, publiés au Journal officiel le 8 août 2025, viennent préciser les conditions et limites de ces mécanismes. Leur apport respectif mérite d’être détaillé.
- Le décret n° 2025-779 : l’encadrement des prêts inter-associatifs
1.1. Finalité
Ce décret autorise un OSBL à accorder à un autre organisme sans but lucratif un prêt à titre accessoire de son activité principale. L’objectif est de faciliter le financement ponctuel de projets ou de besoins de trésorerie, sans que les associations ne contreviennent au monopole bancaire.
1.2. Conditions d’éligibilité
Le prêt ne peut être consenti que si les deux organismes sont :
- Soit membres d’un même groupement (GIE, groupement de coopération sociale ou médico-sociale, groupement d’employeurs, union d’associations, fédération sportive, etc.),
- Soit liés par des relations étroites : activités interdépendantes, gouvernance commune, comptes combinés, objectif social commun.
1.3. Encadrement juridique et financier
Le décret impose un formalisme et des garde-fous stricts :
- Contrat de prêt approuvé selon l’article L. 612-5 du Code de commerce,
- Attestation d’un commissaire aux comptes ou d’un expert-comptable,
- Durée maximale : 5 ans,
- Taux d’intérêt plafonné : taux moyen de rendement des obligations des sociétés privées,
- Montant global limité : 50 % de la trésorerie nette disponible de l’organisme prêteur au début de l’exercice,
- Interdiction de créer une dépendance financière de l’emprunteur vis-à-vis du prêteur.
1.4. Transparence
Les prêts accordés doivent être mentionnés dans le rapport de gestion ou d’activité et annexés aux comptes annuels de l’organisme prêteur.
Apport principal : le décret n° 2025-779 instaure un cadre sécurisé pour des prêts ponctuels entre OSBL, permettant d’accompagner un besoin spécifique de financement, sans mettre en péril la trésorerie du prêteur.
- Le décret n° 2025-780 : la régulation des opérations de trésorerie inter-associatives
2.1. Finalité
À côté des prêts, ce décret encadre les opérations de trésorerie (avances et flux financiers courants) entre OSBL. Il s’agit de faciliter la gestion financière au sein d’un réseau ou d’un ensemble d’associations partenaires.
2.2. Conditions d’éligibilité
Ces opérations ne sont possibles que si les organismes sont :
- Membres d’un même groupement (au sens du décret n° 2025-779),
- Ou engagés dans des relations financières et économiques régulières, attestées par : gouvernance commune, comptes combinés, convention de gestion, appartenance à un réseau ou recours à des statuts-cadres.
2.3. Encadrement juridique et financier
- Formalisation obligatoire par une convention de trésorerie (art. L. 612-5 du Code de commerce),
- Attestation par commissaire aux comptes ou expert-comptable,
- Taux d’intérêt plafonné au même niveau que pour les prêts (taux moyen des obligations privées).
Contrairement aux prêts, aucune limite de durée ou de montant n’est fixée par le décret. L’encadrement porte avant tout sur la justification des liens entre organismes et la régularité des opérations.
2.4. Transparence
Les opérations doivent être retracées dans le rapport de gestion ou d’activité de l’organisme pivot et, le cas échéant, dans l’annexe des comptes annuels.
Apport principal : le décret n° 2025-780 permet une souplesse accrue pour la gestion des flux de trésorerie au sein de réseaux associatifs, en instaurant un cadre juridique clair et transparent.
- Une complémentarité au service du secteur associatif
Ces deux décrets, pris conjointement, offrent au secteur associatif un arsenal juridique inédit :
- Le décret n° 2025-779 sécurise les prêts exceptionnels et limités, utiles pour financer un projet ou une dépense ponctuelle,
- Le décret n° 2025-780 organise les opérations de trésorerie récurrentes, adaptées à la vie des réseaux et fédérations d’associations.
En combinant rigueur (plafonds, durée, contrôle externe) et souplesse (flux réguliers autorisés), ces textes favorisent la mutualisation des ressources financières et renforcent la solidarité économique inter-associative.
Conclusion
Avec les décrets n° 2025-779 et n° 2025-780, le gouvernement dote les associations et organismes sans but lucratif d’outils financiers modernes, permettant de répondre à leurs besoins de financement internes sans dépendre uniquement des financements publics ou bancaires. Il s’agit d’un pas important vers une autonomie financière accrue du secteur associatif, encadrée par des règles de transparence et de sécurité.
- Les décrets n° 2025-779 et n° 2025-780 du 7 août 2025 : un nouveau cadre juridique pour la solidarité financière entre organismes sans but lucratif - 25 octobre 2025
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