En tout état de cause, la pertinence du maintien de la RUP se pose si l’on en juge les résultats de deux rapports ministériels récents sur cette question : en effet, pour le rapport Morange (1) « les avantages matériels de la RUP sont désormais d’une portée quasi théorique ». Quant à l’avantage moral de la RUP, pour le député P. Morange, il demeure « important, mais il ne justifie pas la lourdeur de la procédure ». Le rapport Langlais (2) parle, lui, de « procédure élitiste » qui « n’a pas su s’adapter aux évolutions de la société ».
Certes, le rapprochement de la procédure RUP et RIG comportent des difficultés sur le plan technique, même si actuellement l’on assiste déjà à « un basculement vers la notion plus large d’utilité sociale, notion qui par ailleurs entretient une filiation juridique avec le concept d’intérêt général » (3).
Malgré ces difficultés, nombreux sont les acteurs s’étant prononcés en faveur de l’élaboration d’une reconnaissance unique d’utilité sociale (RUS). Nous avons vu précédemment que les derniers rapports ministériels et parlementaires se montrent favorables à la mise en œuvre d’une telle procédure. Pour M.T. Chéroutre (4), « l’attribution d’une reconnaissance par les pouvoirs publics aux organismes susceptibles d’être exonérés apparaît éminemment souhaitable. Cette reconnaissance accordée pour une durée déterminée apporterait à ces derniers une garantie d’exonération du moins aussi longtemps qu’il ne serait pas prouvé par l’administration qu’ils ne respectent plus les conditions pour lesquelles ils ont obtenu ladite reconnaissance ». De son côté, la FONDA (5) a également exprimé son souhait d’assurer « une meilleure sécurité financière aux associations relevant de l’intérêt général » et s’est montrée « favorable à la création d’une RUS attribuée par une commission tripartite (Etat, Magistrats, Associations) ».
À notre connaissance, deux projets de loi (6) ont été déposés en ce sens pour être rapidement abandonnés par la suite, faute de réelle volonté politique. En effet, comme le soulignait le CNVA (7) à propos de la mise en œuvre de la RUS, « le problème qui se pose n’est pas d’ordre technique, il est politique. » Or, et dans la mesure où la mise en œuvre de la RUS consiste bien en « l’invention progressive d’une prise en charge économique d’un besoin de société » (8), les pouvoirs publics doivent désormais se saisir de ces questions éminemment actuelles en formulant des propositions concrètes tirées des rapports parlementaires et ministériels ci-avant mentionnés.
Sinon, à quoi ces travaux servent-ils ?
Directeur des publications ISBL consultants
En savoir plus :
Voir la contribution de C. Amblard dans son intégralité : « Intérêt général, utilité publique ou utilité sociale : quel mode de reconnaissance pour le secteur associatif ? », ADDES fondation Crédit Coopératif, Paris, 10 mars 2009
Voir les autres travaux présentés lors du XXIIème colloque de l’ADDES : Voir en ligne
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Notes:
[1] P. Morange, Rapport d’information sur la gouvernance et le financement des structures associatives, n°134, assemblée nationale, 1er octobre 2008, p.41 et 42
[2] J.L. Langlais, Pour un partenariat renouvelé entre l’Etat et les associations, rapport ministériel, juin 2008, p. 26
[3] A. Euillet, L’utilité sociale, une notion dérivée de celle d’intérêt général, Revue de droit sanitaire et social, n°2, avril-juin 2002, pp. 2007 - 228
[4] M.T. Chéroute, Exercice et développement de la vie associative dans le cadre de la loi du 1er juillet 1901, rapport au nom du conseil économique et social, n°4, JO du 1er avril 1993
[5] FONDA, Pour une éthique des rapports entre pouvoirs publics et citoyens, séminaire, Paris, 17 octobre 1992
[6] Projet de loi A. Henry, RTD com. 192, 447 : en janvier 2002, ce projet avait lancé une vaste consultation autour du concept d’utilité sociale dans le but de délimiter les associations auxquelles seraient accordées le label ; Proposition de loi n°2779, AN 1996, art. 2 « Les associations peuvent être reconnues d’utilité sociale, à l’issue d’une période probatoire de fonctionnement d’une durée au moins égale à trois ans, lorsqu’elles satisfont cumulativement aux conditions suivantes : avoir un objet social de caractère philanthropique, éducatif, scientifique, humanitaire, sportif, familial, culturel, ou d’action sociale ou de mise en œuvre du patrimoine artistique, ou de défense de l’environnement ou de diffusion de la culture ou de la langue française ; Exercer conformément à cet objet, des activités ouvertes à des personnes qui lui sont extérieures ».
[7] CNVA, Bilan de la vie associative en 1990-1991, La documentation française, Paris 1992 ; Rapport et avis adoptés en session plénière du CNVA le 15 juin 1995 sur « l’utilité sociale des associations et ses conséquences en matière économique, fiscale et financière ».
[8] J.L. Laville et R. Sainsaulieu, Sociologie de l’association : des organisations à l’épreuve du changement social, Ed. Desclée de Brouwer, Paris, 1997, p.320