Dans notre pays, les associations sont essentielles pour lutter contre la grande pauvreté et aider les personnes les plus vulnérables. Nombre d’entre elles ont été créées par une poignée de bénévoles, de militants qui souhaitaient s’investir pour la défense des plus précaires.

Nous constatons aujourd’hui que de nombreux dirigeants associatifs, présidents, trésoriers, membres du conseil d’administration sont vieillissants. Certaines associations ferment leurs portes car leurs dirigeants ne trouvent personne pour reprendre leur combat. Il est important d’analyser ces mécaniques de désaffection et de proposer des pistes de solutions pour contrer ce phénomène.

 

De nombreuses associations n’arrivent pas à trouver de nouveaux administrateurs

Quand je travaillais à l’Agence du Don en Nature, il m’est souvent arrivé d’aller à la rencontre d’associations présidées et tenues à bout de bras par une personne, et ce dans toute la France. J’ai toujours trouvé émouvant que des personnes de soixante-dix ans ou plus continuent à se démener pour faire vivre leur association.

Dans la confidentialité d’un échange avec la personne extérieure que j’étais, ces hommes et ces femmes me confiaient « ne plus tenir le coup, mais ne pas vouloir arrêter, car il n’y a personne pour prendre la suite ».  Je parle ici d’associations principalement gérées par des bénévoles, avec parfois quelques salariés en contrat aidé. Des militants, des épiceries solidaires, des associations de quartiers.

Il y a aussi ces bénévoles vus dans les Banques alimentaires, pas de la première jeunesse. Et dans beaucoup d’autres associations. Aujourd’hui, nous faisons face à une raréfaction des personnes en capacité et volontaires pour prendre la charge d’une association. Il est vrai que c’est une forme de sacrifice, cela prend beaucoup de temps. D’ici dix ans, beaucoup d’associations auront fermé pour cette raison. Il y a aujourd’hui, de moins en moins de personnes volontaires pour prendre ces responsabilités.

 

 

Témoignage de Patrick Pozo, président de GRIM, secteur médico-social, dans le Rhône

« La gouvernance d’une association est complexe. Elle consiste à préserver la valeur éthique qui la fonde tout en préservant la pérennité économique, avec l’exigence de développer la dimension humaine. Les modalités d’organisation du secteur, qui s’appuient sur des instruments de quantification comptable et technique, conduisent à une « crise identitaire » des membres bénévoles du conseil d’administration.

La complexité des processus dépouille la gouvernance de son rôle « politique » au profit d’un rôle « technique » qu’elle ne maîtrise dans son entièreté. La « technocratie » prend le pas sur le « politique ».

La gouvernance parvient difficilement à mettre en œuvre un soutien large et global aux salariés (émotionnel, informatif, matériel et d’estime). Cet état de fait pose cruellement la question du renouvellement des instances de gouvernance. A l’instar de la non-attractivité du secteur pour les professionnels, il en est de même pour les « bénévoles administrateurs » au risque à l’avenir d’un secteur en perte de valeurs et d’éthique. En effet, si la valeur économique prime sur l’éthique et la dimension humaine, le risque de glisser vers une pure logique d’entreprise peut engendrer des conséquences non négligeables (départs de bénévoles, perte de repères, image de marque, utilité sociale, etc…). Cet état de fait ne permet pas (ou difficilement) de construire une pensée politique sur les enjeux. Les processus technocratiques prennent la main sur le politique.

 

 

Quelles solutions trouver pour favoriser le renouvellement des gouvernances associatives ?

Plusieurs solutions se dessinent pour permettre aux associations de favoriser le renouvellement de leurs instances de gouvernance. Il existe de nombreuses pistes à explorer, en voici quelques-unes :

  • Valoriser le bénévolat : des politiques publiques permettant la valorisation du bénévolat, à travers la fiscalité ou d’autres formes d’incitation, auraient une utilité. La question qui se pose est de savoir jusqu’où aller dans cette incitation fiscale ?
  • Former les instances de gouvernance : souvent, les administrateurs dans les associations n’ont pas de formation ad hoc et ainsi ne structurent pas leur conseil d’administration. Cette formation permettrait une meilleure préparation des successions pour les associations.
  • Rémunérer les présidents d’associations : ce sujet est souvent tabou, pourtant dans certaines associations, le président doit dédier beaucoup de temps à la gouvernance de l’association. Il est entendu que la gouvernance associative doit rester désintéressée, toutefois ce sujet est essentiel, il conviendrait de dédommager parfois les présidents pour le temps passé.
  • Mettre en place des gouvernances « cogérées » et sur des temps plus courts : partager une responsabilité est moins effrayant que de devoir la porter seul. Aussi, de nouveaux modèles émergent, avec un engagement plus cadré sur certaines missions, mais ils sont encore minoritaires.

 

Il n’y a pas de solidarité sans associations. Il n’y a pas d’association sans conseil d’administration. Cette thématique du renouvellement des modes de gouvernance doit être au cœur de l’effort mené dans les politiques associatives des cinq prochaines années.

 

 

Noémie Caponnetto, responsable projets, communication et partenariats associatifs

 

En savoir plus :

Faut-il rémunérer les dirigeants associatifs ?, Colas Amblard, Institut ISBL, mai 2019

 

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