Chaque jour qui passe charrie son lot de mauvaises nouvelles. Que ce soit sur le plan social, économique, environnemental et désormais démocratique, nous assistons impuissants à un véritable effondrement. Le déclin n’a pas commencé en 2017, mais il s’est accentué récemment par une succession de choix dictés par la satisfaction quasi systématique d’intérêts privés et par la multiplication d’orientations iniques définies par une équipe gouvernementale totalement dépassée et globalement incompétente, dont un grand nombre de ses ministres sont issus du « vieux monde » et/ou mis en cause dans des affaires judiciaires. Pourtant, rien n’est inéluctable. De nombreuses solutions existent pour remédier au marasme actuel, la problématique à résoudre n’est pas technique mais politique !

 

Parmi elles, l’Économie sociale et solidaire (ESS), riche de son passé, de ses valeurs et savoir-faire, est porteuse d’espoirs et peut être le point de convergence des luttes sociales réclamant des transformations rapides et profondes. Si l’on tient compte de l’urgence climatique, qui réduit considérablement l’espérance d’un monde nouveau, comment ce mouvement doit-il se positionner ?

 

La politique Macron : vers un effondrement programmé ?

Bien entendu, il s’en trouvera toujours pour dire que ce constat est pessimiste voire excessivement alarmant. Aussi, il convient de justifier cette prise de position au regard d’un certain nombre d’illustrations difficilement contestables et parfaitement vérifiables.

 

Constats alarmants

Sur le plan social, économique, environnemental et démocratique, il faut aujourd’hui tirer la sonnette d’alarme. Les signaux inquiétants se multiplient dangereusement et appellent à un véritable sursaut républicain.

  • Sur le plan social

La situation est extrêmement préoccupante. Un peu partout, les Restos du Cœur crient famine, et sont obligés de diminuer l’aide alimentaire par personne. Dans le Doubs, « on va passer à 1 650 000 repas » explique l’un des responsables alors qu’un peu plus de 1 300 000 repas l’ont été lors de la dernière campagne. A Redon, les Restos du Cœur ne pourront ouvrir que deux fois par semaine, en raison de la hausse des coûts (+30% en un an) et les collectes hebdomadaires seront moindres, alors que le nombre d’inscrits lui ne cesse d’augmenter. A Ambérieu-en-Bugey, à Lezignan-Corbières, dans la Manche, les Yvelines, partout sur le territoire national, la campagne d’hiver qui a commencé le 21 novembre dernier s’annonce rude. Les exemples sont légion et bon nombre d’associations de bienfaisance reconnues d’intérêt général (le paradoxe !) ont d’ores et déjà annoncé qu’elles vont devoir refuser du monde. 8% des bénéficiaires ne pourront pas être accueillis cet hiver. Le problème : Les Restos du Cœur assure 35% de l’aide alimentaire en France (8,5 millions de repas par an). Un responsable de la Croix Rouge à Besançon confirme également cette nécessité de diminuer la quantité de denrées distribuées dans les paniers. Elle constate de son côté une augmentation de 30 à 35% des demandes d’aide alors que « les grandes surfaces donnent de moins en moins de produits, les magasins vendant désormais leurs produits ‘’dates courtes’’ au lieu de les donner aux associations », nous informe un responsable du Doubs.  Par ailleurs, au niveau national, les Restos du Cœur ont besoin de 35 millions d’euros supplémentaires pour combler le déficit en 2023. L’État a bien annoncé quelques dotations supplémentaires, mais une grande partie d’entre elles était déjà affectée. Des partenaires privés ont manifesté leur soutien, mais la problématique risque de revenir d’année en année si rien n’est fait pour solutionner cette précarité alimentaire qui mine notre pays depuis peu, alors même que la France figure parmi les pays les plus riches de la planète. Si bien que, selon son Président Patrice Drouet, « les Restos du Cœur pourraient mettre la clés sous la porte d’ici trois ans. »

Et le mal est profond. Selon Laurence Champier, directrice générale de la Fédération des Banques alimentaires, « parmi les 17% des actifs qui recourent à l’aide alimentaire, plus de 60% sont en CDI, mais souvent à temps partiel avec un revenu moyen inférieur à 1070 euros par mois : la précarité alimentaire touche donc de plus en plus de travailleurs pauvres. » L’Insee a d’ailleurs annoncé le 15 novembre 2023 que la pauvreté a progressé de 14,5% en 2021. Surexposées à la précarité, les femmes sont majoritaires à pousser la porte du Secours Catholique, selon son dernier rapport présenté le 14 novembre 2023. Sans parler de nos étudiants dont un tiers d’entre eux saute « souvent » ou «de temps en temps » un repas par manque d’argent tandis que 45 % craignent de tomber dans la pauvreté selon une enquête réalisée par l’Ifop et l’association de distribution d’aide alimentaire COP1, dévoilée le 12 septembre dernier. Dans une tribune récente pour « l’Obs », Ano Kuhanathan et Taoufik Vallipuram[1]A. Kuhanathan et T. Vallipuram, Des augmentations et de la solidarité, ou des émeutes de la faim ? L’obs, 29 sept. 2023 alertent sur la nécessité d’une autre politique afin que les Français mangent à leur faim. Plus d’1 français sur 3 déclare ne plus faire 3 repas dans la journée et ils sont autant à se priver pour nourrir leurs enfants. Mais ce n’est pas tout, les vols à l’étalage ont bondi de plus de 14 % sur un an, laissant supposer qu’en France, de plus en plus de gens volent pour se nourrir. A défaut d’augmentation des salaires, des minimas sociaux et de la solidarité, nous risquons des émeutes de la faim[2]F. Joignot, Emeutes : La République doit-elle les craindre ? LeMonde.fr Blog, 24 mars 2023 ; I. Marhnache, Richesse et damnahon ! Alternahves Eco., mars 2020, n°399 ; E. Dacheux et D. Goujon, … Continue reading.

Et la période des fêtes de fin d’année s’annonce douloureuse pour beaucoup. Selon une étude menée par l’Ifop en 2022 « 34% des ménages craign[ai]ent de ne pas avoir assez d’argent pour acheter les cadeaux de Noël » et 28% des français en 2023 envisagent de payer leurs cadeaux de fin d’année en plusieurs fois. Bref, la situation sociale craque de partout, au moment où le chômage repart à la hausse (+0,2% au troisième trimestre, soit 64 000 chômeurs de plus).

A cette situation, il faut ajouter la suppression de l’AME couvrant les frais de santé des étrangers en situation irrégulière sur sol français, remplacée par une aide médicale d’urgence décriée par de plus en plus de médecins ; le conditionnement du RSA à des travaux d’intérêt général ; la réforme de l’assurance chômage qui vient diminuer le nombre de chômeurs indemnisés passant de 40 % du total des demandeurs d’emploi en décembre 2021, à 36 % en juin 2022. Récemment encore, le gouvernement Macron sous la baguette de son ministre de l’Économie Bruno Le Maire, vient de réduire la durée d’indemnisation pour les plus de 55 ans, six mois après la réforme controversée du « passage en force » de la retraite à 64 ans et alors que le nombre de séniors au RSA a été multiplié par deux en dix ans.

  • Sur le plan économique

La situation n’est pas plus brillante, loin de là.  Tous les yeux sont rivés vers 2024 et la crainte de voir la France se heurter à un mur de faillite d’entreprises de tout genre. Les tendances soulignées dans la dernière enquête de la Bpifrance auprès des TPE-MPE sont préoccupantes : « Tous les indicateurs se dégradent, sans s’effondrer pour autant », souligne l’économiste Denis Ferrand. Ouf ! Nous voilà rassurés ! Cependant, les délais de paiements sont jugés élevés et une proportion importante de chefs d’entreprise déclare que « l’accès au financement bancaire est difficile, les trésoreries s’érodent… On rentre dans le dur ! » Pour 2024, les associations font également part de leurs grandes incertitudes liées à l’inflation : 28% d’entre elles appréhendent avec difficulté l’année en cours et 32% avec une certaine crainte à court terme. Ces craintes concernent à la fois l’impact de l’inflation et la manière d’y répondre. Quant au secteur de l’ESS, notre ministre de l’Économie a déjà prévenu lors de la présentation du projet de Loi de finances 2024, que le déficit public doit repasser « quoi qu’il en coûte »en dessous des 3% et a, pour cela, ciblé les prochaines coupes budgétaires citant par 3 fois en dix minutes de présentation les associations et les aides sociales qui soi-disant « nous coûtent un pognon de dingue ! » Fort heureusement, la ministre déléguée chargée des PME, du Commerce, de l’Artisanat du Tourisme, … et de l’ESS (ouf !), Olivia Grégoire – après l’épisode peu glorieux de Marlène Schiappa – est venue présenter son plan d’action pour les associations et autres structures de l’ESS. Et le moins que l’on puisse dire c’est qu’il n’y a pas de quoi casser trois pattes à un canard ! 20 M€ de financement accordés à un secteur qui pèse près de 10 % des salariés en France, alors que 7 milliards ont été promis aux start-up, ces sociétés commerciales fantômes qui vendent leur fonds de commerce plus vite que leur ombre et le plus souvent sans avoir créée le moindre emploi pérenne. Mais peu importe, l’heure est à la « French tech », la « Start-up Nation », les « Social Impact Bonds » etc.[3]Michel Feltin-Palas, Anglicismes : Emmanuel Macron a-t-il un problème avec la langue française ? L’express, 18 mars 2022et autres anglicismes d’inspiration néolibérale, tout autant destinés à masquer la pauvreté des politiques réellement menées par ce gouvernement illibéral que de ringardiser toutes formes d’expression contestataires ou contrepropositions susceptibles de troubler le « grand dessein » de nos capitaines d’industrie, souvent très proches du pouvoir politique.

Sur le plan macro-économique, peu de motifs de satisfaction sont à entrevoir. Quand le ministre de l’Économie se félicite de la résilience de l’économie française, il occulte les pertes abyssales du commerce extérieur, un des marqueurs phares de la compétitivité de notre pays à l’heure de la mondialisation érigée fut un temps par nos élites, en cheville avec les technocrates de Bercy, en véritable totem de « ruissellement », sinon comme le seul échappatoire possible pour nos « politiques » en panne totale d’inspiration. En 2022, le déficit de la balance commerciale des biens a battu un record historique, dépassant pour la première fois les 160 M€, à précisément 164 M€, ont indiqué ce mardi les Douanes. Et malgré une pression fiscale qui ne cesse d’augmenter[4]Dans le classement des pays européens les plus imposés, la France arrive en deuxième position, juste derrière le Danemark dont le poids des prélèvements obligatoires s’établit à 46,88% … Continue reading, la situation économique de la France n’a jamais été aussi critique. A la fin du deuxième trimestre 2023, la dette publique (au sens de Maastricht) a (encore) augmenté de 34,5 Md€ et s’élève à plus de 3 000 Md€. L’augmentation de la dette publique s’accompagne d’une baisse de la trésorerie des administrations publiques (-23,3 Md€), si bien que la dette nette augmente d’avantage que la dette brute (+56 Md€) et s’établit à 111,8% du PIB. Le remboursement de cette même dette devient le premier poste de dépense de notre pays, obérant de facto toute marge de manœuvre que nécessite la mise en œuvre d’une politique de transformation à la hauteur de la situation actuelle, notamment dans le secteur de l’environnement et de la transition écologique.

  • Sur le plan écologique et environnemental

Après l’échec de la Convention pour le Climat où l’on a assisté à un lent détricotage des décisions prises par un panel de nos concitoyens à cause d’une cohorte de lobbyistes toujours plus actifs (seulement 15 propositions sur 149 ont été retranscrites), et malgré les engagements pris la main sur le cœur par notre président de la République, ce qui aurait pu être un premier pas vers une démocratie participative a fait long feu. « Qui aurait pu prédire la crise climatique ? » nous a-t-il dit le 04 janvier 2023, alors que le rapport Meadows nous alerte sur les limites de la croissance depuis 1972. Les rapports du GIEC, dont le dernier a été publié le 20 mars 2023, nous exhortent depuis des années de limiter nos émissions de gaz à effet de serre[5]Les activités humaines ont réchauffé le climat à un rythme sans précédent : la température de la surface du globe s’est élevée d’ 1,1 °C par rapport à la période pré-industrielle ; … Continue reading et Antonio Guterres déclare courageusement que « l’effondrement climatique a commencé » en marge d’un communiqué publié mercredi 6 septembre, dans lequel l’Organisation météorologique mondiale, une institution des Nations unies, rapporte que la Terre vient de connaître les trois mois les plus chauds jamais enregistrés. Le réchauffement climatique présente un péril éminent pour le vivant et la biodiversité française (pas seulement) qui est d’ores et déjà fortement en déclin, selon l’Office Français de la Biodiversité[6]https://naturefrance.fr/sites/default/files/2023-06/Publication_10ansONB_web.pdf. Mais peu lui importe, notre chantre du réalisme politique, lui, il « adore la bagnole » ! Comme il l’a affirmé haut et fort devant 10,5 millions de français lors d’un journal télévisé de France 2 et de TF1, le 24 septembre, au cours d’un entretien censé être consacré à l’écologie. Comment dès lors s’étonner que l’engagement dans la lutte contre le changement climatique ne fasse plus autant consensus au lendemain de la pandémie Covid-19 ? Au moment même où la finance durable – pourtant un des leviers parmi les plus importants pour financer la décarbonation – peine à faire recette[7]« Le problème est que, à l’heure actuelle, les besoins sont bien supérieurs aux montants investis », pointe Dejan Glavas, professeur en finance durable à l’Essca, en citant les … Continue reading. Les exemples de comportement climaticide d’un gouvernement totalement hors sol se multiplient, et ces quelques lignes ne suffiront pas à tous les détailler : entre l’abstention de la France le 13 octobre dernier qui a permis à la Commission européenne d’autoriser le glyphosate, cet herbicide cancérigène, pour dix ans supplémentaires, la nomination de Christophe Béchu au poste de ministre de la Transition écologique qui défend le nucléaire, la chasse (après s’être opposé au mariage pour tous), les dérives du ministre de l’Intérieur Darmanin qui plutôt que de s’occuper du trafic de drogue dans les cités passe son temps à traquer les « écoterroristes » et à pourfendre les combats menés par les associations de protection de l’environnement, au risque de se faire durement « taclés » par le Conseil d’Etat comme dans l’affaire des Soulèvements de la Terre. Mais, de tout cela, le gouvernement Macron s’en fiche royalement comme de son dernier dîner à Versailles. À deux reprises en 2021, l’État français a été condamné par la justice pour inaction climatique. Une victoire pour les ONG, mais qui interroge sur l’efficacité de ces grands procès. En refusant d’assortir sa condamnation d’astreintes, le juge ne risque-t-il pas de donner aux pouvoirs publics un sentiment d’impunité ? Ainsi, les jeux sont faits et le Gouvernement n’a pas l’intention de passer à la caisse, des décisions de justice il n’en a cure ! Et de toute façon à quoi bon, puisque ce seront aux français de régler la note.

  • Sur le plan politique et démocratique

C’est à un véritable effondrement auquel on assite. Entre la multiplication des 49.3 – le 19ème engagé depuis la nomination d’Elisabeth Borne à Matignon – pour faire passer des mesures anti-sociales totalement déconnectées de la réalité et impopulaires, la montée des mouvements d’extrême-droite de plus en plus décomplexés, il n’y a pas là de quoi être rassurés ! Désormais, des groupes néofascistes défilent dans nos rues en toute impunité. Une note des renseignements avait prévenu l’Elysée de l’organisation d’actions violentes par des groupes néo-nazis, mais rien n’a été fait, et Eric Ciotti, l’actuel président des Républicains, refuse de condamner la descente d’un groupe d’extrême droite dans le quartier de Romans-sur-Isère le soir du samedi 25 novembre. En France, comme dans beaucoup d’autres pays en Europe (Italie, Pays-Bas récemment), nous assistons à la montée inexorable de l’extrême droite, comme si de rien n’était. En région parisienne, une soirée musicale, avec des concerts de rock de groupe néonazis, a été organisée le 05 mai 2023 au sein de la maison des associations Simone-Veil, inaugurée en janvier 2022 et baptisée en hommage à l’ex-ministre, rescapée des camps de la mort sans que cela ne pousse les autorités politiques à intervenir en amont. Mais quand il s’agit de Gilets jaunes ou de écologistes qui protestent contre la hausse du coût de la vie ou tentent de préserver un bien commun (eau), ils sont arrêtés avant même la tenue des manifestations…

De telles pratiques en disent long sur l’état de déliquescence de la démocratie[8]Plus de 8 Français sur 10 (83%) se déclarent attachés au régime démocratique et près des deux tiers (61%) estiment que la démocratie est en danger, selon un sondage Harris Interactive … Continue reading dans notre pays[9]Sur la base de 60 indicateurs différents, chaque pays se voit attribuer un score sur dix, qui traduit son niveau d’avancement démocratique. Avec 7.99, la France est depuis peu classée à la … Continue reading, au point que nous serions presque heureux d’apprendre que le Conseil Constitutionnel a censuré le 16 novembre dernier la loi « Justice » de Dupond-Moretti qui projetait l’activation à distance des téléphones portables et appareils électroniques, pour écouter et filmer à leur insu des personnes visées dans certaines enquêtes. Mais cette « bonne » nouvelle fut de courte durée ! Elle a immédiatement été tempérée par la découverte récente que la police utilise depuis 2015 la reconnaissance faciale de façon illégale. Cela passerait presque inaperçue si quelques journalistes indépendants – dont certains sont depuis sous une pression policières inédites sous la Vème République – ne nous avaient pas révélé l’affaire . Sujets à une (trop) forte concentration entre les mains des élites en place, les médias « mainstream » préfèrent nous abreuver d’information 24h/24h sur les inondations en France ou encore les chutes de neige en hiver, plutôt que de dénoncer les nombreuses atteintes à nos libertés individuelles et collectives, comme par exemple la mise en place récente d’un QR Code pour circuler dans Paris pendant le Jeux Olympiques de 2024, comme annoncé par le Préfecture de Paris pas plus tard que hier ; ou l’adoption de cette la loi confortant le respect des principes Républicains attentatoire à la liberté d’association et d’expression[10]https://lemouvementassociatif.org/contrat-dengagement-republicain-le-mouvement-associatif-alerte/ ; ou encore les tentatives un peu désespérées du ministre de l’Intérieur Darmanin de dissoudre Les Soulèvements de la Terre, ce groupement de citoyens engagés dont seul tort a été de s’opposer à la poursuite de la construction de retenues d’eau à Sainte-Soline à des fins strictement privatives et et par ailleurs précédemment jugées illégales par la justice française.

Il n’y a donc plus rien à attendre de ce gouvernement Borne, comme de ceux qui vont immanquablement lui succéder, en dehors d’une volonté farouche de conserver les rênes du pouvoir à grand coup de 49.3 aux fins de satisfaire le plus longtemps possible les desiderata de ceux – Toujours les mêmes[11]En France, de mars 2020 à octobre 2021, la fortune des milliardaires français a augmenté de 86% et de mieux en mieux[12]Les dividendes, en France, ont augmenté de 13,3 % par rapport à 2022, et leur part représente près d’un tiers du total des dividendes versés en Europe (30%) ! – qui en profitent le plus.

 

Un effondrement programmé ?

L’heure est grave. Après l’écrasement du mouvement des Gilets Jaunes à grand renfort de LBD, le passage en force de la réforme des retraites malgré les millions de français dans la rue, les émeutes en juillet dernier à la suite d’un énième épisode de violences policières ayant conduit à la mort du petit Nahel, le Gouvernement Macron démontre jour après jour qu’il n’en a cure des revendications sociales, stigmates de la pauvreté et du désarroi qui s’abat sur notre pays depuis peu et génèrent des réactions de plus en plus violentes. Plutôt que d’écouter ses concitoyens et d’accorder sa confiance aux corps intermédiaires (associations, syndicats, etc.), à l’intelligence citoyenne et collective, le pouvoir en place préfère déployer méthodiquement quelques 200 futures brigades de gendarmerie, partout en France. Il vient d’ailleurs de passer commande pour 78 millions d’euros de grenades, le plus gros achat depuis 10 ans ! De quoi réprimer, par la force, toute nouvelle contestation sociale pendant des lustres. Et plutôt que de décider de lutter contre l’évasion fiscale qui défigure notre pays, appauvrit nos services publics et porte atteinte à notre cohésion sociale, il répond par un racisme de classe reposant sur l’idée que le peuple n’est pas suffisamment éclairé pour décider de son propre sort. Les « sans-dents » n’auront que du mépris de la part de ce gouvernement qui lui-même semble être gouverné par une oligarchie haut dessus des lois et qui ne cesse de s’enrichir, encore et encore, profitant d’une fiscalité avantageuse (suppression de l’ISF, flax taxe, etc.) en pleine période de crise. La situation ne peut pas durer ainsi longtemps et nous assistons à un véritable effondrement programmé qui pourrait nous amener au désastre si rien ne change avant les prochaines présidentielles en 2024, alors même que nos concitoyens ne savent plus à quels « saints » se vouer[13]Plus de 6 français sur 10 estiment que Marine Le Pen est sincère dans sa lutte contre l’antisémitisme..

 

Face au marasme actuel, l’ESS doit se mobiliser !

Nous avons bien conscience que le constat de la situation est sombre, certains le trouverons même excessif. Mais avouons-le, tant au niveau international que national, il existe actuellement peu de motif pour véritablement se réjouir ! C’est d’ailleurs globalement ce qui ressort des Journées de l’Économie Autrement organisées par la revue Alternatives Économiques les 24 et 25 novembre dernier à Dijon. Réunissant un panel de personnalités représentatives de la société civile (syndicalistes, dirigeants associatifs et de l’ESS, économistes, sociologues, universitaires, juristes, etc.) pour toutes, dans une approche trans partisane, la même analyse semble partagée. Nous sommes dans un moment de basculement auquel il convient de répondre par des transformations profondes et urgentes.

 

Politisation de l’ESS

Invoquant régulièrement le Conseil National de la Résistance (CNR), dont l’un des plus fervents représentant n’est autre que Claude Alphandery, président d’honneur du Labo ESS, l’ESS se définit comme un mode d’entreprendre autrement, en réponse aux dérives d’un capitalisme devenu financier et délétère sur le plan économique, social, environnemental et politique. Il est désormais venu le temps de rappeler ce précieux conseil délivré en son temps par un autre éminent représentant du CNR, le regretté Stéphane Hessel dans son essai intitulé en 2020 : « Indignez-vous ! » Cet opuscule, d’une trentaine de pages, défendait l’idée selon laquelle l’indignation est le ferment de l’« esprit de résistance. »[14]https://www.dailymotion.com/video/xgcc9j

Sans trahir la pensée de ces glorieux aînés, c’est dans cet ordre d’idées que nous invitons l’ensemble des forces de l’ESS à politiser son action, à radicaliser ses modes d’expression et d’action, à prendre part de manière explicite et visible aux différents mouvements sociaux, grèves et manifestations qui vont immanquablement avoir lieu dans les mois et années à venir, pour imposer urgemment et nécessairement une transformation profonde et durable. Avec ses millions de bénévoles et salariés, elle doit engager le rapport de force, il en va de sa responsabilité face à l’effondrement qui s’annonce. Elle doit devenir le levier indispensable au changement, de façon pacifique et démocratique, et engager dans cette bataille toutes ses capacités de conviction et d’inspiration, dans l’intérêt de nos concitoyens – en particulier ceux parmi les plus fragiles – totalement déboussolés par la situation actuelle.

 

Comment faire ?

La question est bien évidemment délicate et les réponses devront bien évidemment être coconstruites avec les différentes familles de l’ESS, avec ESS France et Le Mouvement associatif en premier lieu, mais aussi les syndicats et l’ensemble des démocrates, politisés ou non, qui souhaiteront participer à la reconstruction. Parce ce qu’il s’agit bien d’une reconstruction dont nous avons besoin ! Pas de « mesurettes » et encore moins de « social ou green washing » que certains esprits malicieux tentent de nous imposer pour nous faire prendre des vessies pour des lanternes. Parce ce que l’on ne répare pas une maison qui brûle ! Pour cela, il faudra dépasser nos querelles internes, nos égos, non ambitions personnelles conscientes ou inconscientes, notre angélisme historique issue de notre propension au « care ». L’ensemble des corps intermédiaires que sont les associations, les coopératives, les mutuelles, les forces syndicales, mais également les entreprises véritablement citoyennes, les citoyens organisés ou non, doivent rapidement trouver les moyens de parler d’une seule et même voix, créer des coalitions efficaces et pérennes pour s’opposer aux forces de destruction qui sapent peu à peu notre démocratie, notre environnement naturel, notre volonté de vivre ensemble, nos valeurs républicaines et laïques. Partout organisons la désobéissance civile face à l’oppression et la destruction du vivant, pour s’opposer aux élites irresponsables et incompétentes, à toutes les formes extrémistes qui dégradent notre socle démocratique, menacent nos institutions et détruisent nos services publics.

Pour ce faire, inspirons-nous de Pierre Waldeck-Rousseau qui disait « L’homme ne peut rien faire en bien ou en mal qu’en s’associant. Il n’y a pas d’armure plus solide contre l’oppression ni d’outils plus merveilleux pour les grandes œuvres. »

Faisons les choses en bien, mais faisons-les rapidement et avec conviction, car l’inéluctable n’est jamais loin !

 

 

Colas Amblard, président de l’Institut ISBL

 

En savoir plus :

Plénière de clôture des Journées de l’Économie Autrement 2023 – Comment sortir de la crise démocratique ?

Le modèle associatif peut-il s’inscrire dans un nouveau paradigme économique ?, J-L Cabrespines, Institut ISBL mai 2021

Economie sociale et solidaire : sortir de l’impuissance politique !, C. Amblard, Institut ISBL octobre 2020

 

 

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References

References
1 A. Kuhanathan et T. Vallipuram, Des augmentations et de la solidarité, ou des émeutes de la faim ? L’obs, 29 sept. 2023
2 F. Joignot, Emeutes : La République doit-elle les craindre ? LeMonde.fr Blog, 24 mars 2023 ; I. Marhnache, Richesse et damnahon ! Alternahves Eco., mars 2020, n°399 ; E. Dacheux et D. Goujon, Cohésion sociale et richesse économique, Management & Avenir 2013/7, n°65, p. 141 à 153
3 Michel Feltin-Palas, Anglicismes : Emmanuel Macron a-t-il un problème avec la langue française ? L’express, 18 mars 2022
4 Dans le classement des pays européens les plus imposés, la France arrive en deuxième position, juste derrière le Danemark dont le poids des prélèvements obligatoires s’établit à 46,88% du PIB.
5 Les activités humaines ont réchauffé le climat à un rythme sans précédent : la température de la surface du globe s’est élevée d’ 1,1 °C par rapport à la période pré-industrielle ; Quels que soient les scénarios d’émission, le GIEC estime que le réchauffement de la planète atteindra 1,5 °C dès le début des années 2030
6 https://naturefrance.fr/sites/default/files/2023-06/Publication_10ansONB_web.pdf
7 « Le problème est que, à l’heure actuelle, les besoins sont bien supérieurs aux montants investis », pointe Dejan Glavas, professeur en finance durable à l’Essca, en citant les résultats du rapport 2023 de Climate Policy Initiative . Ce groupe de recherche sur les investissements liés au climat estime qu’entre 8.000 M$ et 9.000 M$ devraient être injectés chaque année, d’ici à 2030, dans le financement de la réduction des émissions de gaz à effet de serre, ainsi que dans l’adaptation au changement climatique, par exemple sur le front des infrastructures. « Or nous atteignons à ce jour 1.265 M$, soit environ 1 % du PIB mondial », rappelle Dejan Glavas.
8 Plus de 8 Français sur 10 (83%) se déclarent attachés au régime démocratique et près des deux tiers (61%) estiment que la démocratie est en danger, selon un sondage Harris Interactive réalisé pour France Bleu et le magazine Challenges dévoilé ce mercredi 21 décembre 2011
9 Sur la base de 60 indicateurs différents, chaque pays se voit attribuer un score sur dix, qui traduit son niveau d’avancement démocratique. Avec 7.99, la France est depuis peu classée à la 24ème place parmi les démocraties « défaillantes »
10 https://lemouvementassociatif.org/contrat-dengagement-republicain-le-mouvement-associatif-alerte/
11 En France, de mars 2020 à octobre 2021, la fortune des milliardaires français a augmenté de 86%
12 Les dividendes, en France, ont augmenté de 13,3 % par rapport à 2022, et leur part représente près d’un tiers du total des dividendes versés en Europe (30%)
13 Plus de 6 français sur 10 estiment que Marine Le Pen est sincère dans sa lutte contre l’antisémitisme.
14 https://www.dailymotion.com/video/xgcc9j





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