TEXTE DE LA QUESTION publiée au JO le 02/04/2013 p. 3478

M. Patrick Lemasle appelle l’attention de M. le ministre de l’intérieur sur les éventuels soupçons de délit dans les relations entre le maire et les élus communaux vis-à-vis des associations. En effet, la jurisprudence extensive de la chambre criminelle de la Cour de cassation semblerait indiquer que le maire, en tant que président d’honneur des associations de sa commune, est un membre de droit de celles-ci et qu’à ce titre le fait qu’il vote les subventions peut constituer une prise illégale d’intérêt même s’il n’en retire aucun profit matériel ou personnel. Il lui demande la position du Gouvernement sur ce point particulier.

TEXTE DE LA RÉPONSE publiée au JO le 19/11/2013 p. 12106

L’appréciation souveraine qu’exerce le juge sur les faits et les circonstances de chaque affaire ne permet pas de tirer des conclusions générales sur l’issue d’une instance dans laquelle un élu municipal, président d’honneur d’une association, serait mis en cause pour prise illégale d’intérêts après avoir participé au vote de subventions en faveur de cette association. L’article 432-12 du code pénal définit la prise illégale d’intérêts comme « le fait, par une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public ou par une personne investie d’un mandat électif public, de prendre, recevoir ou conserver, directement ou indirectement, un intérêt quelconque dans une entreprise ou dans une opération dont elle a, au moment de l’acte, en tout ou partie, la charge d’assurer la surveillance, l’administration, la liquidation ou le paiement ». L’intérêt pris peut être d’ordre matériel ou moral, direct ou indirect. Dans sa décision n° 08-82068 du 22 octobre 2008, la Cour de cassation a confirmé le jugement de la cour d’appel de Versailles du 24 janvier 2008 qui condamnait quatre élus municipaux pour prise illégale d’intérêts parce qu’ils avaient participé aux délibérations et pris part aux votes attribuant des subventions aux associations municipales ou intercommunales qu’ils présidaient en leur qualité de maire, d’adjoint ou de conseiller, alors même qu’ils ne percevaient aucune rémunération pour leur activité au sein de ces associations et que l’association présidée par le maire servait un intérêt public, en l’occurrence, l’insertion des jeunes de deux communes. Le juge judiciaire considère que l’infraction peut être constituée même si l’auteur n’en tire pas profit, même si la collectivité ne subit pas de préjudice et même si l’intérêt pris ou conservé n’est pas en contradiction avec l’intérêt communal. Elle peut également être constituée quand bien même l’élu ne donnerait qu’un avis sur l’attribution de subventions sans participer à la décision finale (Cass. crim. , 9 mars 2005, n° 04-83615 ; Cass. crim. , 9 février 2011, n° 10-82988). La qualité de président d’honneur d’une association est une distinction honorifique et symbolique. Elle n’implique pas, habituellement, une participation active dans l’organisation, le fonctionnement et l’activité de l’association, contrairement à la fonction de président dirigeant l’association. Cette circonstance, si elle peut être de nature à atténuer l’existence d’un intérêt matériel ou moral, direct ou indirect, ne suffit pas, à elle seule, à écarter la possibilité d’une condamnation pour prise illégale d’intérêts, au vu de la jurisprudence actuelle.

Anne-Cécile Vivien, avocat associé, Ernst & Young

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Documents joints:

Cour de cassation, chambre criminelle, 22 octobre 2008



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