La Cour de cassation vient nous rappeler le caractère précaire de la situation contractuelle des dirigeants associatifs dans un arrêt du 9 mars 2009. Sur ce point, la révocation ad nutum constitue un danger pour les mandataires sociaux en place qu’il convient de maîtriser à la lumière des précisions apportées par la juridiction suprême.
Lors de l’assemblée générale ordinaire du 23 août 2005, le président de l’AGCA s’est vu révoqué par les autres membres, alors même que sa révocation n’était pas à l’ordre du jour.
Par la suite, l’assemblée générale a élu un nouveau président le 21 janvier 2006.
L’ancien président de l’AGCA demande alors l’annulation de sa révocation et conteste par ailleurs la régularité de l’élection de son remplaçant, celle-ci n’apparaissant pas à l’ordre du jour de l’assemblée générale.
La Cour d’appel de Caen, par un arrêt du 18 septembre 2007, rejette les demandes du président révoqué et valide tant sa révocation que la nomination de son successeur au regard d’un procès-verbal de constat d’huissier.
L’ancien président se pourvoie en cassation.
L’assemblée générale d’une association peut-elle procéder à la révocation immédiate de l’un de ses dirigeants sans avoir préalablement inscrit cette révocation à l’ordre du jour ?
Par un arrêt du 5 mars 2009, la Première Chambre civile de la Cour de cassation valide dans un premier temps la révocation de l’ancien dirigeant de l’association, sa révocation remplissant les conditions d’une révocation immédiate, et retient la nullité de la nomination du nouveau président dans un second temps, cette dernière n’ayant pas été inscrite à l’ordre du jour de l’assemblée générale.
La Cour se prononce ici sur les règles relatives à la régularité de la nomination et révocation des membres du conseil d’administration. Rappelons les conditions de mise en œuvre de la révocation ad nutum. En principe, en l’absence de stipulations statutaires contraires, une association est libre de révoquer le mandat qui la lie à ses dirigeants (C. civ. Art. 2004).
Cependant, cette révocation n’est pas totalement libre, et pour éviter tout abus, elle doit répondre à plusieurs conditions :
- Elle doit être prononcée par les personnes qui ont investi les dirigeants dans leur mandat, sauf stipulations statutaires contraires (CA Paris, 21 avril 1986). En général, ce sera donc l’assemblée générale de l’association qui détiendra ce pouvoir.
- Lorsque la compétence revient à l’assemblée générale, la révocation doit être inscrite à l’ordre du jour ou, à défaut, justifiée par des révélations imprévues faites en séance (incident de séance) (Cass. Civ. 1e, 29 novembre 1994).
- La décision doit être expresse.
- En cas d’abus de droit, caractérisé par un exercice vexatoire et intempestif du droit de révocation, la révocation peut donner droit à des dommages-intérêts.
La Cour de cassation précise tout d’abord que la révocation d’un dirigeant, lors d’une assemblée générale, sans inscription préalable à l’ordre du jour, est valide lorsqu’elle est l’expression d’un « manque de confiance des membres dans leur président », notamment lorsque ce dernier est « suspecté de sacrifier l’intérêt de l’association », et que son attitude devenait « un obstacle au fonctionnement de celle-ci ».
La Haute Juridiction dresse ici un portrait de l’incident de séance, unique circonstance permettant une révocation de dirigeant sans inscription à l’ordre du jour.
Ainsi, la Cour de cassation reprend les règles de la révocation ad nutum attachée à tout mandat.
Enfin, au troisième moyen, la Cour de cassation rappelle les règles fondamentales de délibération de l’assemblée générale, notamment quant à la nomination des dirigeants : l’assemblée ne peut délibérer que sur les points figurant à l’ordre du jour, à peine de nullité de la résolution adoptée.
En effet, elle souligne que, quand bien même l’assemblée ait voté à la majorité la nomination du nouveau président de l’association, majorité inscrite dans le procès-verbal de l’assemblée, et constatée par procès-verbal d’huissier de justice, cette nomination est annulable dans la mesure où elle n’était pas prévue à l’ordre du jour de la séance.
Conseil : prévoir dans les statuts que la révocation des administrateurs et les membres du bureau ne peut intervenir qu’à la majorité qualifiée des 2/3 des membres (respectivement de l’AG ou du CA).
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