M. Gérard Charasse (député PRG) appelle l’attention de Mme la ministre des sports, de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative sur le financement des clubs sportifs d’envergure régionale.
Il lui revient en effet qu’une pratique qui serait répandue consiste à servir aux joueurs recrutés une indemnité de matches, certains avantages en nature tels qu’une prise en charge d’une partie de leur loyer ou un véhicule de fonction mais que la grande majorité de leur rémunération serait assuré par Pôle emploi lorsque les joueurs en question, provenant de club semi-professionnels ou professionnels, avaient des droits ouverts qu’ils font valoir.
L’engagement qui est demandé à ces joueurs les empêche naturellement de rechercher activement un emploi alors même qu’ils épuisent leurs droits et qu’ils poursuivent en réalité une carrière dont la rémunération repose sur la redistribution organisée par la collectivité nationale. Il lui demande de bien vouloir procéder à une évaluation de ces pratiques afin de connaître le poids financier de ces dernières pour évaluer la nécessité d’une action qui, dans ce domaine, pourrait conduire à préserver les droits à la formation et à l’emploi de ces personnes et de rendre plus transparent le financement réel des clubs sportifs.
Texte de la réponse
La situation économique, juridique et sociale des sportifs est parfois précaire.
Nombre d’entre eux se situent à la lisière du sport amateur de haut-niveau et du sport professionnel. Même si elle n’est aujourd’hui pas documentée de manière précise, cette situation peut exister.
C’est pour cela que le secrétaire d’Etat chargé des sports a installé le 15 septembre 2014 une mission de réflexion sur le statut du sportif présidée par Jean-Pierre Karaquillo, agrégé des facultés de droit, spécialiste de droit du sport et acteur permanent du mouvement sportif national et international.
Cette mission a proposé des solutions visant à sécuriser la situation des sportifs professionnels et de haut niveau qui s’articulent autour de trois grandes idées :
– Les sportifs (haut niveau et professionnels) ont une carrière courte. Il faut améliorer leur formation et la préparation à leur reconversion.
– Les sportifs de haut niveau doivent avoir accès à une couverture sociale complète qui intègre le risque lié aux accidents sportifs.
– Les sportifs et entraîneurs professionnels doivent pouvoir exercer dans un cadre de travail sécurisé juridiquement, et ce quel que soit leur niveau de pratique.
A la suite de ce rapport, une proposition de loi visant à « protéger les sportifs de haut niveau et professionnels et à sécuriser leur situation juridique et sociale » a été votée à l’unanimité en première lecture par l’Assemblée nationale le 8 juin 2015.
Dans le secteur du sport professionnel, il est unanimement reconnu que le contrat de travail à durée déterminée (CDD) est le seul contrat qui soit adapté.
Il est indispensable pour l’équilibre et l’équité des compétitions par la stabilité qu’il offre aux relations contractuelles entre clubs et sportifs et entraîneurs, et assure, dans le même temps, une meilleure protection à la fois des salariés et des employeurs que ne le ferait le recours au contrat à durée indéterminée. Celui-ci comporte des risques importants de licenciements pour insuffisance de résultat par exemple.
La proposition de loi crée un CDD spécifique aux sportifs et entraîneurs professionnels salariés. Ce contrat définit le public concerné comme toute personne ayant pour activité rémunérée l’exercice d’une activité sportive dans un lien de subordination juridique avec une association ou une société sportive, ainsi que les personnes qui entraînent ces sportifs.
Ce cadre permet d’inclure au public éligible à ce contrat les sportifs et entraîneurs de la « zone grise » du sport, prétendument amateur, où des joueurs, mais aussi, bien souvent des joueuses, vivent d’indemnités qui les amènent vers des situations de fin de droits, sans couverture sociale. Ce contrat leur permettra d’accéder à une relation de travail stable et aux droits sociaux qui en découlent.
En outre, ce texte consacre la responsabilité des clubs en matière de suivi socio professionnel, et leur donne un outil pour le mettre en œuvre : l’accès des titulaires du CDD spécifique au financement des périodes de professionnalisation.
Réf. Question 38993 p 7054 JOAN
Si la réponse ministérielle élude une partie de la question (cumul des allocations de chômage et d’une rémunération sous forme d’indemnités de matches et d’avantages en nature, avec impossibilité pratique de rechercher activement un emploi, condition pourtant indispensable pour percevoir les allocations de chômage), laproposition de loi qui sera discutée en séance publique au Sénat le 21 octobre 2015, n’aborde pas plus la question.
Me J-Christophe Beckensteiner
Avocat spécialiste en droit du travail
Associé du cabinet Fidal, Lyon
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