La loi visant à améliorer la trésorerie des associations constitue une réelle avancée pour le secteur[1]L. n° 2021-875 du 1er juill. 2021, JO du 2, JA 2021, n° 644, p. 43, étude E. Benazeth.. Elle prévoit de nouvelles dispositions pour le paiement plus rapide des subventions ainsi que pour en conserver une partie et résoudre une impasse de trésorerie sans passer par la banque.

 

La gestion de la trésorerie des associations est un exercice souvent très difficile ! C’est la raison pour laquelle on n’insistera jamais assez sur l’importance, pour les associations, de se constituer des fonds propres[2]Dossier « Fonds propres – La bourse etlavie!», JA2013, n° 487,p.18.. Ceux-ci peuvent être construits notamment grâce à un excédent raisonnable affecté, année après année, à la constitution d’un fonds de roulement indispensable au bon fonctionnement de l’association.

Ce sujet a justement récemment fait l’objet d’une attention particulière de la part du législateur : la loi du 1er juillet 2021 visant à améliorer la trésorerie des associations[3]L. n° 2021-875, préc. comporte plusieurs dispositions prévoyant de nouvelles facilités de trésorerie et de financement pour les associations. Cette loi, qui fait écho à la loi du 1er juillet 1901, aura des impacts importants sur la gestion et la réglementation des associations et autres organismes sans but lucratif (OSBL).

Son article 1er dispose qu’il revient désormais à la convention conclue entre l’autorité administrative et l’association de prévoir les conditions dans lesquelles tout ou partie de la subvention qui n’aurait pas été intégralement dépensée pourra être conservé par l’organisme s’il est à but non lucratif. Il est à noter que la notion d’excédent raisonnable, évoquée dans la préparation de cette loi, n’a pas été reprise.

L’article 2 de la même loi met en place un délai de paiement général de 60 jours des subventions attribuées à une association, à moins qu’il n’en ait été notifié autrement par convention entre la collectivité et l’association.

Par ailleurs, certains besoins – par exemple, un investissement financé par une subvention qui ne sera perçue que plusieurs mois après présentation d’une facture acquittée – nécessitent de faire appel à l’emprunt. On peut certes aller voir sa banque, mais il est aussi possible de profiter de la trésorerie confortable d’une autre association. Le prêt entre associations est en effet autorisé grâce à l’article 3 de la loi du 1er juillet 2021, si tant est qu’il soit fait dans le respect des dispositions légales, avec prudence et rigueur. Une manière parmi d’autres de rendre concrète la solidarité interassociative !

 

 

SUBVENTION

Excédent raisonnable ou subvention non consommée

Depuis le 3 juillet 2021, une association bénéficiant d’une convention de subvention peut conserver tout ou partie de l’aide attribuée n’ayant pas été intégralement consommée, dans les conditions fixées par cette convention[4]L. n° 2000-321 du 12 avr. 2000, art. 10, al. 4.. Avant de détailler dans quelle mesure une association peut bénéficier de cette avancée, il convient de rappeler le cadre légal d’une subvention : « Constituent des subventions […] les contributions facultatives de toute nature, valorisées dans l’acte d’attribution, décidées par les autorités administratives et les organismes chargés de la gestion d’un service public industriel et commercial [SPIC], justifiées par un intérêt général et destinées à la réalisation d’une action ou d’un projet d’investissement, à la contribution au développement d’activités ou au financement global de l’activité de l’organisme de droit privé bénéficiaire. Ces actions, projets ou activités sont initiés, définis et mis en œuvre par les organismes de droit privé bénéficiaires ».

« Ces contributions ne peuvent constituer la rémunération de prestations individualisées répondant aux besoins des autorités ou organismes qui les accordent. »[5]Ibid., art. 9-1.Sont considérés comme autorités administratives « les administrations de l’État, les collectivités territoriales, les établissements publics à caractère administratif, les organismes de sécurité sociale et les autres organismes chargés de la gestion d’un service public administratif »[6]Ibid., art. 9-1..

La convention doit définir l’objet, le montant, les modalités de versement et les conditions d’utilisation de l’aide attribuée ainsi que les modalités de son contrôle et de son évaluation[7]Ibid., art. 10, al. 4.. De plus, il revient dorénavant à la convention conclue entre l’autorité administrative et l’association de prévoir les conditions dans lesquelles tout ou partie de la subvention qui n’aurait pas été intégralement dépensée pourra être conservé par l’organisme s’il est à but non lucratif.

Cette possibilité de conserver tout ou partie d’une subvention n’ayant pas été intégralement consommée dès lors que cet excédent est « raisonnable » avait déjà été intégrée par une circulaire du Premier ministre[7]Circ. n° 5811/SG du 29 sept. 2015, dossier « Pouvoirs publics et associations – Le 2e temps de la Valls », JA 2016, n° 533, p. 16., mais, en pratique, ce sujet était souvent débattu. La loi du 1er juillet 2021 consacre ainsi le sujet de « l’excédent raisonnable », même si, dans la version finale de la loi, n’apparaissent plus les termes de « bénéfice raisonnable » ni d’« excédent raisonnable », contrairement à la proposition de loi initiale[8]Ass. nat., proposition de loi n° 1329 du 17 oct. 2018.. Cet excédent consistait « à conserver une partie des fonds octroyés dans le cadre d’un financement public, pour autant que les objectifs partagés aient été atteints et que l’excédent constitué [relevait] d’une maîtrise des dépenses n’ayant pas nui à l’exécution des missions »[9]Ibid.. Ces références ont donc finalement été supprimées et la convention d’attribution devra ainsi déterminer la part de la subvention non consommée qui pourrait être conservée par l’OSBL. Pour rappel, il est exigé, au-delà de 23 000 euros de subvention par autorité administrative, une convention entre l’organisme bénéficiaire et l’autorité publique qui émet la subvention. Il est possible d’en déduire que seules les subventions de plus de 23 000 euros seraient concernées.

Un délai de paiement à déterminer

La trésorerie des associations peut être affectée par un paiement tardif d’une subvention. Avec la loi du 1er juillet 2021, le délai de paiement par l’autorité administrative ou l’organisme chargé de la gestion d’un SPIC est fixé à 60 jours « à compter de la date de la notification de la décision portant attribution de la subvention, à moins que l’autorité administrative, le cas échéant sous forme de convention, n’ait arrêté d’autres dates de versement ou n’ait subordonné le versement à la survenance d’un évènement déterminé »[10]L. n° 2000-321, préc., art. 10, al. 4.. L’association devra donc se référer à la convention pour identifier les dates d’encaissement de ses subventions. Celles qui n’exigent pas la passation d’une convention – les subventions inférieures à 23 000 euros – seront encaissables dans un délai maximal de 60 jours à compter de la notification de la subvention.

 

 

PRÊTS ENTRE ASSOCIATIONS ET FONDATIONS

En principe et conformément à l’article L. 511-5 du code monétaire et financier, et sauf cas particuliers prévus par les textes, une association ne peut pas réaliser d’opérations de crédit à titre habituel. Une telle pratique est sanctionnée pénalement[11]C. mon. fin., art. L. 571-3.. Cette activité est réservée aux établissements de crédit et aux sociétés de financement.

Toutefois, la loi a prévu quelques dérogations à ce monopole bancaire. En effet, suivant l’article L. 511-6 du code monétaire et financier, certaines associations peuvent consentir des prêts et avances financières, à savoir :

  • „„les associations habilitées à consentir des prêts pour la création, le développement et la reprise d’entreprises ou pour la réalisation de projets d’insertion par des personnes physiques (agrément obligatoire) ;
  • „„les associations agréées pour collecter le 1% logement des employeurs et qui octroient des prêts au logement;
  • „„les associations qui consentent des prêts, sur leurs fonds propres, à leurs ressortissants ou adhérents, dans le cadre exclusif de leur mission ou de leur objet.

Par conséquent, une association qui n’entrait pas dans ces catégories ne pouvait consentir une avance financière.
Aussi, la loi du 1er juillet 2021 est venue élargir la dérogation en ajoutant à l’article L. 511-6 un alinéa 1o bis. Désormais, les associations d’un même réseau (fédération, union d’associations, etc.) ayant une activité d’intérêt général[12]CGI, art. 200, 1, b). et les associations et fondations reconnues d’utilité publique peuvent accorder des prêts sur leurs ressources propres.

La loi soumet néanmoins l’octroi de ces prêts à plusieurs conditions. En effet, les prêts consentis par les associations et fondations autorisées sur leurs ressources disponibles à long terme doivent être :

  • à moins de deux ans ;
  • „„à taux zéro, soit sans intérêt ;
  • octroyés aux membres de l’union mentionnée à l’article 7 du décret du 16 août 1901 ou de la fédération d’associations constituée sous forme d’association dont elles sont membres.

Par conséquent, une association qui n’entre pas dans ces catégories prémentionnées ne peut consentir une avance financière notamment à une autre association. Elle ne pourrait le faire qu’exceptionnellement, de manière isolée et non à titre habituel ou usuel[13]C. mon. fin., art. L. 511-5..
Les exceptions légales présentées ci-dessus sont celles qui relèvent du monopole bancaire. L’octroi d’un prêt par une association à une autre association, consenti à titre gratuit, sans intérêt ni contrepartie, reste légal si ce prêt entre bien dans l’objet social de l’association car, dans ce cas, cette opération de crédit ne relève pas du champ du monopole bancaire mais du code civil[14]C. civ., art. 1892 à 1904 : prêt de consommation ou simple prêt..

Quoi qu’il en soit et dans tous les cas de prêts autorisés, l’association prêteuse sera tenue d’adapter son objet social. Sa capacité est en effet limitée aux actes utiles à la réalisation de son objet tel que défini par les statuts et aux actes qui leur sont accessoires. La décision de prêter doit être prise afin de permettre l’accomplissement de son objet social, sous peine de nullité[15]C. civ., art. 1145.. Elle sera tenue de l’indiquer dans son objet au moment de sa constitution ou de modifier son objet au cours de la vie sociale afin d’insérer une clause en ce sens. À défaut d’une telle mention, les dirigeants seront responsables envers elle des dommages causés par leur faute en cas de violation des dispositions statutaires.

En outre, afin de sécuriser l’opération, il est utile d’indiquer dans les statuts l’organe habilité à prendre ce type de décision (direction, assemblée générale, etc.). À défaut de précision statutaire, une opération de prêt s’apparente souvent à une décision concernant la gestion courante du groupement, relevant donc de la direction, de l’organe collégial investi de ce type de décision (président, conseil d’administration ou bureau). Mais si l’octroi de prêt est significatif, il constitue un acte dépassant l’administration courante, relevant de l’organe souverain de l’association, c’est-à-dire son assemblée générale.

Enfin, pour la formalisation du prêt, il est fortement recommandé aux associations d’établir « une convention de trésorerie » afin d’identifier les contraintes légales à respecter, ci-dessus énumérées. Ainsi, dans cette convention, l’association bénéficiaire pourra justifier de l’intérêt de l’association prêteuse à effectuer cette opération. La convention devra faire état des détails relatifs aux modalités d’octroi et de remboursement du prêt (montant, durée, conditions de remboursement de l’apport de trésorerie, etc.). Cette convention sera un document indispensable en cas de difficulté dans la réalisation de l’opération et pour vérifier la correcte application des accords entre les parties. Par ailleurs, les conditions de ce prêt devront être mentionnées dans l’annexe des comptes annuels.

 

 

Angélique Poupon, expert-comptable, commissaire aux comptes, membre de la commission « Associations » du conseil régional de l’ordre des experts- comptables Paris Île-de-France

 

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Gérard LEJEUNE, expert-comptable, commissaire aux comptes, membre de la commission « Associations » du conseil régional de l’ordre des experts- comptables Paris Île-de-France

 

 

 

 

En savoir plus :

 

 

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Gérard Lejeune

References

References
1 L. n° 2021-875 du 1er juill. 2021, JO du 2, JA 2021, n° 644, p. 43, étude E. Benazeth.
2 Dossier « Fonds propres – La bourse etlavie!», JA2013, n° 487,p.18.
3 L. n° 2021-875, préc.
4 L. n° 2000-321 du 12 avr. 2000, art. 10, al. 4.
5, 6 Ibid., art. 9-1.
7 Circ. n° 5811/SG du 29 sept. 2015, dossier « Pouvoirs publics et associations – Le 2e temps de la Valls », JA 2016, n° 533, p. 16.
8 Ass. nat., proposition de loi n° 1329 du 17 oct. 2018.
9 Ibid.
10 L. n° 2000-321, préc., art. 10, al. 4.
11 C. mon. fin., art. L. 571-3.
12 CGI, art. 200, 1, b).
13 C. mon. fin., art. L. 511-5.
14 C. civ., art. 1892 à 1904 : prêt de consommation ou simple prêt.
15 C. civ., art. 1145.





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