Les centres de naturisme gérant un camping sous la forme associative n’entrent pas en concurrence avec des entreprises proposant le même service d’hébergement à tout public par des entreprises commerciales. Tel est en substance le jugement rendu par la Cour administrative d’appel (CAA)de Nancy en date du 14 juin 2007 à propos de l’association Club du Soleil.
Il s’agissait pour l’Association Club du soleil de savoir si elle était redevable de la taxe professionnelle alors même que, par jugement rendu le 1er mars 2005, le Tribunal administratif de Strasbourg avait répondu par l’affirmative.
1. Rappel des règles fiscales applicables
En effet, aux termes de l’article 1447 du Code général des impôts (CGI), « la taxe professionnelle est due chaque année par des personnes physiques ou morales qui exercent à titre habituel une activité professionnelle non salariée ».
Néanmoins, l’instruction fiscale BOI 4 H-05-06 du 18 décembre 2006 admet que les associations sont dispensées de ces dispositions si, d’une part, leur gestion présente un caractère désintéressée et, d’autre part, les services qu’elles rendent ne sont pas offerts en concurrence dans la même zone géographique d’attraction que ceux proposés au même public par des entreprises commerciales exerçant une activité identique.
Dans l’hypothèse où l’association intervient dans un domaine d’activité ou dans un secteur géographique où existent des entreprises commerciales, l’exonération de l’impôts sur les sociétés et de la taxe professionnelle lui reste acquise si elle exerce son activité dans des conditions différentes de celles de ces entreprises commerciales.
2. En l’espèce
Pour le Tribunal administratif de Strasbourg, dans son jugement du 1er mars 2005, il s’agissait à titre principal de retenir les arguments soulevés par le Directeur du contrôle fiscal lors de ses mémoires enregistrés les 10 octobre 2005 et 19 septembre 2006 pour conclure à l’assujettissement de l’Association Club du Soleil aux impôts précités :
- c’est la recherche d’un bénéfice et non sa réalisation effective qui établit le caractère professionnel et le but lucratif d’une activité ;
- les services rendus par l’association ne se distinguent pas des produits offerts par des entreprises commerciales et la circonstance que le club soit affilié à la Fédération française de naturisme n’influe en rien sur son activité propre qui correspond, en fait, à l’exploitation d’un camping avec piscine destiné à la fois aux adhérents et aux touristes de passage.
De son côté, l’Association soutenait que :
- elle n’exerçait aucune activité professionnelle au sens de l’article précité ;
- les services rendus n’entraient pas en concurrence avec ceux d’une entreprises commerciales dans la même zone géographique d’attraction et pour un même public ;
- c’est à tord que le Tribunal de Strasbourg a estimé que le camping était ouvert à toute personne ;
- Les tarifs pratiqués étaient inférieurs à ceux des autres campings ;
- les montants de ses recettes accessoires étaient restés inférieurs à 60.000 euros conformément aux prescriptions de l’article 206-1 du CGI et ses activités non lucratives étaient demeurées prépondérantes puisque 90% des surfaces affectées à l’activité de l’association étaient consacrées aux activités non lucratives et qu’au moins 75% des adhérents s’adonnaient aux activités non lucratives de l’Association.
Pour conclure à l’annulation du jugement rendu par le Tribunal de Strasbourg, il est intéressant de constater que la Cour administrative d’appel a retenu les arguments suivants :
- il n’est pas contesté que la gestion est désintéressée ;
- l’Association Club du Soleil est affiliée à la Fédération Française de Naturisme et gère, en vue de permettre à ses adhérents de pratiquer le naturisme conformément à la législation en vigueur, un centre naturiste en exploitant, sur le terrain dont elle dispose, un camping avec piscine ;
- l’accès au centre de naturisme est réservé, outre aux membres de l’association, aux personnes affiliées à la Fédération française de naturisme ou à la Fédération naturiste internationale ;
- du fait de leur spécificité, les services qu’elle rend n’entrent pas en concurrence dans la même zone géographique d’attraction avec les activités de camping proposées à tout public par des entreprises commerciales ;
- le seul camping ayant une vocation analogue, dont il n’est d’ailleurs pas établi qu’il soit géré par une société commerciale, est situé à plus de 10 kms ;
Pour la CAA de Nancy, il ressort ainsi que, l’Association Club du Soleil est fondée à soutenir qu’en jugeant qu’elle perçoit en contrepartie du service rendu « des redevances qui ne diffèrent pas sensiblement de celles demandées dans des installations similaires situées dans la même zone géographique, alors que des services analogues à ceux dispensés par l’association et s’adressant donc au même public ne sont pas offerts, dans la même zone géographique d’attraction, par une entreprise commerciale », le Tribunal administratif de Strasbourg a fait une inexacte application des dispositions précitées.
L’Association Club du Soleil demeure donc exonérée de la taxe professionnelle.
3. Commentaires
C’est finalement une décision tout à fait conforme à l’instruction fiscale BOI 4 H-05606 du 18 décembre 2006 relative au régime fiscal des organismes à but lucratif.
Dans cette décision, il convient de constater que la Cour administrative d’appel de Nancy s’est tout autant intéressée aux services rendus qu’à ceux non rendus par une association gérant un camping.
Elle conforte en tout cas la prépondérance de la notion de public concernant la recherche d’une situation de concurrence.
Cette décision devrait intéresser bon nombre d’associations sportives développant des services sportifs payants (location d’installations sportives, stages de sports, etc) en direction de leurs propres membres ou ceux des fédérations auxquelles elles se rattachement.
En savoir plus :
- CAA Nancy, 3ème ch., 14/06/2007, inédit n°05NC00544
- FORMATION ISBL consultants, Optimiser le régime fiscal de votre association, par Colas Amblard : voir en ligne
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