TEXTE DE LA QUESTION au gouvernement n° 0431G de M. Cédric Perrin (Territoire de Belfort – Les Républicains)publiée dans le JO Sénat du 11/07/2018 – p. 9439.
Madame la ministre de la culture, la saison des festivals de musique démarre en demi-teinte. Vous connaissez l’inquiétude qu’a suscitée la circulaire du ministère de l’intérieur du 15 mai, laquelle entraîne une augmentation importante des frais de sécurité appliqués aux festivals.
C’est avec soulagement que nous avons pris connaissance vendredi dernier du communiqué commun que vous avez publié avec le ministre de l’intérieur, dans lequel vous appelez les préfets à faire preuve de discernement dans son application.
Cette mise au point est la bienvenue, elle mérite toutefois des éclaircissements, tant la notion de discernement varie d’un territoire à l’autre. Les festivals de musique en dépendent. Ils sont aujourd’hui menacés par cette hausse des charges liées à la sécurité. Certains d’ailleurs succombent, tandis que de grands groupes privés du divertissement font irruption dans le paysage des festivals. Cette option met en péril l’offre et l’initiative é de nos territoires, ainsi que les retombées économiques.
N’est-ce pas d’ailleurs pour garantir cet aménagement culturel équilibré, sur l’ensemble du territoire, que cette circulaire prévoit un bouclier tarifaire pour les festivals à but non lucratif ? L’intention est louable, encore faut-il qu’elle soit appliquée ! Pis, cette circulaire se retourne parfois contre les associations qu’elle est censée protéger.
Par un coup de baguette magique, le festival des Eurockéennes de Belfort se voit opposer pour la première fois depuis trente ans un caractère « lucratif ». Cette requalification imprévisible et inexpliquée pourrait entraîner une augmentation de 800 % de ses coûts de sécurité, mais aussi et surtout un changement de régime fiscal et la fin du mécénat, qui représente 15 % de son budget.
Même si l’État cherche de l’agent partout, j’en appelle à mon tour au discernement !
Les défis sont déjà immenses pour les festivals. Ils deviennent insurmontables quand le traitement est à géométrie variable. Madame la ministre, comment remédier à ces divergences d’interprétation dont les conséquences sont mortifères pour les festivals sur l’ensemble de notre territoire ?
TEXTE DE LA REPONSE du Ministère de la culture publiée dans le JO Sénat du 11/07/2018 – p. 9440
Mme Françoise Nyssen, ministre de la culture. Monsieur le sénateur Cédric Perrin, les festivals participent effectivement, comme vous l’avez dit, à la vie culturelle de nos territoires. Ils sont un levier de rayonnement et de dynamisme économique certain. Ils témoignent de la vitalité de la création artistique, suscitent la ferveur autour d’artistes et permettent l’émergence de talents et de formes nouvelles. Les Eurockéennes de Belfort ou encore les Vieilles Charrues en sont de parfaits exemples.
L’écosystème des festivals est aujourd’hui fragilisé, vous l’avez souligné, par l’alourdissement de leurs charges. D’une part, les festivals sont affectés, et je tiens à le redire ici, par la hausse des cachets des artistes qui résulte du phénomène de concentration et de rachats de festivals par de grands groupes. Nous nous sommes penchés sur ce point. Ce phénomène fera l’objet d’une mission interministérielle, qui consultera les collectivités et les acteurs culturels. D’autre part, dans un contexte de menace terroriste élevée, chacune de ces manifestations doit donner lieu à la mise en place de mesures adaptées pour garantir la sécurité, et ces mesures, vous le savez, ont un coût.
Vous l’avez indiqué, la circulaire du 15 mai 2018 du ministère de l’intérieur a apporté une clarification bienvenue. Elle a rappelé les règles qui régissent la facturation des services d’ordre. Le montant de la prestation doit toujours rester compatible, c’est bien précisé, avec l’équilibre économique des festivals. Toute évolution éventuelle du montant facturé doit être discutée suffisamment en amont avec l’organisateur.
Devant les difficultés qui ont pu parfois survenir, le ministre de l’intérieur a rappelé aux préfets la nécessité de faire preuve de discernement dans l’application de ces instructions. Les cas seront étudiés et les directions régionales des affaires culturelles, les DRAC, reverront avec chaque préfet la situation afin que les festivals ne soient pas fragilisés.
Un bilan d’étape de cette circulaire sera réalisé à l’automne dans le cadre d’un comité interministériel de suivi de la sécurité des établissements et événements culturels. L’attention particulière de l’État et des collectivités est plus que jamais nécessaire pour les festivals. Il y en a 5 000 en France. Ils sont non seulement une ressource culturelle et économique, mais aussi un facteur de cohésion sociale et de vivre-ensemble. C’est pourquoi le ministère a nommé un référent festival en la personne de l’inspecteur général des affaires culturelles Serge Kancel. (Applaudissements sur des travées du groupe La République En Marche.)
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